Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/321

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3.000 francs disponibles dans 40 ans, parce que j’ai grandement lieu de craindre de ne plus vivre dans 40 ans ; parce que 40 ans représentent, même pour celui qui ne pense pas à la mort ou qui a autant de souci des intérêts de ses héritiers que de ses intérêts propres, un intervalle où ne s’étendent pas, en général, les prévisions et les calculs des hommes.

Veut-on comparer ce qu’est la dépréciation du futur chez un même individu aux différents moments de sa vie, on verra la même irrégularité : les exemples sont fréquents de prodigues qui se rangent et qui deviennent d’excellents administrateurs de leur patrimoine. Ce que l’on peut dire, en général, c’est que le sentiment et la pratique de la prévoyance se développent chez l’homme avec l’âge. Avec l’âge, l’économie devient une habitude que combattent de moins en moins les tendances contraires ; les désirs de jouissances réelles et immédiates s’amortissent, donnant plus d’importance et de force au désir de posséder.

Compare-t-on les différents individus entre eux ? cette comparaison conduira à des résultats identiques, Tandis que certaines gens font preuve d’une extrême prévoyance, et égalent exactement la jouissance future à la jouissance présente, l’acquisition future à l’acquisition présente, d’autres semblent ne se préoccuper nullement de l’avenir et sacrifient complètement celui-ci au présent.

Enfin, on voit certaines époques, certaines races, être moins prévoyantes que d’autres : ce sont bien entendu les moins civilisées, la prévoyance étant à la fois l’indice d’une conduite plus raisonnable et la condition de l’amélioration progressive de l’état économique[1].

  1. Il ne faudrait pas cependant établir un rapport trop rigoureux entre l’esprit d’économie et la civilisation ou le caractère progressif de