Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/322

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151. En somme, il ne paraît pas que la dépréciation du futur, en supposant qu’elle fût la seule cause de l’intérêt, dût établir un intérêt très élevé. Chez la plupart des hommes cette particularité psychologique ne se manifeste qu’assez faiblement. Je ne vois guère que deux catégories d’hommes dont la conduite soit modifiée par elle d’une façon importante. D’une part, il y a les prodigues, ceux-là par exemple — ce sont les plus nombreux — qui, dans une certaine période de leur jeunesse, par insouciance et par légèreté, par l’effet encore de quelque passion, ou bien souvent pour suivre une mode et se faire remarquer, se laissent aller, ou même s’appliquent à dissiper tout ou partie de leur patrimoine, alors que leur intérêt bien compris s’y opposerait. D’un autre côté, il y a ceux qui, voyant La mort venir et préférant leur bien-être à celui de leurs héritiers, vendent, pour en consommer la valeur avant leur mort, transforment en une sorte de rente viagère, ou échangent contre une rente viagère véritable des biens qui ne sont pas consommables, qui consomment encore des biens provenant de l’amortissement de capitaux anciens[1]. Par le fait des uns et des autres, il y a perpétuellement une certaine quantité de capitaux qui sont détruits, qui sont consommés

    la production. Les Anglais, les Américains du nord économisent moins que les Français : mais cette cause d’infériorité est compensée chez eux par leur plus grande initiative.

  1. L’individu qui vend, pour en consommer improductivement le prix pendant sa vie, une terre, une maison, cet individu détruit vraiment des capitaux, Celui qui achète la terre, par exemple, est un capitaliste qui cherche un placement pour ses capitaux ; si vous ne lui offrez pas votre terre, il trouvera un autre placement ; lui offrant votre terre, vous empêchez un placement capitalistique d’être opéré, vous absorbez, pour les consommer, des capitaux qui eussent reçu une destination d’un autre genre. Le fait de donner ensuite le prix de la terre à une société qui vous assurera une rente viagère ne change rien à l’affaire. Si vous confiez vos fonds à une société, à un individu, c’est parce que, nul ne sachant à quel moment au juste il mourra, vous ne sauriez pas vous-même, sans être quasiment certain de vous trom-