Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/348

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été attirée depuis lors[1], renverse la conclusion à laquelle j’avais abouti.


3. Je donnerai un autre exemple des fautes où m’a conduit naguère une vue trop objective des faits. Cet exemple est celui des conflits que j’ai cru voir se produire entre les intérêts particuliers et l’intérêt général dans le cas des richesses créées ou plutôt accrues par l’action lente des forces naturelles.

Le propriétaire d’une forêt à l’état de futaie sombre, laquelle rapporte annuellement le maximum de ce qu’elle peut rapporter, aura avantage à pratiquer une coupe blanche, du moins à abréger l’aménagement[2]. Il diminuera par là son revenu annuel de 200 francs par exemple, mais d’autre part il entrera immédiatement en possession d’une somme de 6.000 francs ; et l’opération lui sera avantageuse parce que, le taux courant de l’intérêt étant 5 %, on peut avec 6.000 francs s’assurer un revenu annuel de 300 francs. L’avantage de la société, maintenant, est-il conforme à celui de notre propriétaire ? Point, disais-je, si cet individu ou si ceux à qui il prêtera les 6.000 francs de la coupe n’emploient pas cette somme productivement, si du moins, une partie des 6.000 francs étant dépensée, comme on dit, improductivement, la partie consacrée à améliorer la production ne donne pas un revenu annuel de 200 francs.

Voilà comment je raisonnais. Mais si le propriétaire de la forêt consomme les 6.000 francs, ce peut être parce que cette consommation lui est plus avantageuse que la conservation d’un revenu annuel de 200 francs ; et semblablement si les 6.000 francs sont consommés par des emprunteurs, c’est peut-être que cette consommation leur est plus utile que l’acquisition d’un revenu de

    tion des capitalistes, et il y aura lieu de tenir pour indifférents les déplacements que ces mêmes opérations amèneront dans la consommation des autres membres de la société.

  1. Dans un passage, cependant, de mon étude de 1901, j’en ai tenu compte (au § 189). Parlant des prêts pour la consommation, je notais que ces prêts n’étaient pas toujours socialement mauvais « Si les emprunteurs, disais-je, s’engagent à rendre, pour qu’ils reçoivent, , c’est qu’ils y trouvent leur avantage, c’est qu’une quantité de biens à consommer tout de suite vaut plus, pour eux, qu’une quantité à consommer plus tard. Et comme l’opération est avantageuse aussi au préteur, elle est en définitive, quand on la considère en elle-même, deux fois bonne ». J’ajoutais que les prêts pour la consommation empêchaient, parfois, des opérations « socialement capitalistiques », mais que la somme des avantages retirés de ces prêts par les contractants pouvait très bien dépasser l’utilité sociale des opérations qu’on eût faites en leur place. Mon tort a été de ne faire intervenir que dans ce passage la notion de l’équilibre de la consommation.
  2. Voir § 206.