Page:Landry, L’intérêt du capital, 1904.djvu/353

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dit appelle des corrections sérieuses, j’y renvoie le lecteur[1]. Si l’on admet la possibilité, l’existence d’entreprises productives qui, fonctionnant au mieux des intérêts du producteur, ne fonctionnent pas cependant au mieux des intérêts de la collectivité — et il est impossible de ne pas admettre qu’il y en ait de telles —, alors, comme rien n’empêche que ces entreprises soient capitalistiques, comme il faut, même, qu’elles soient capitalistiques, toute entreprise productive étant capitalistique à quelque degré, on devra nécessairement admettre que la manière, pour un particulier, de tirer de ses capitaux le rendement le plus fort n’est pas celle qui accroît le plus la richesse, le bien-être social, ou que, encore, les avances de capital qui seraient demandées par l’intérêt social ne sont pas toujours profitables aux capitalistes[2].

Je ne prendrai qu’un exemple. Soit un industriel qui a le monopole de la fabrication d’une marchandise. Avançant, pour cette fabrication, un capital de 100.000 francs, il fabrique 5.000 unités par an, qui prennent un prix de 115 francs, et lui assurent pour son capital un rendement de 15 %. S’il avançait 100.000 francs de plus, la production serait doublée ; le prix de l’unité baisserait et tomberait à 106 francs. L’intérêt social voudrait que ces 100.000 francs supplémentaires fussent avancés ; car ces 100.000 francs permettraient de produire pour 106.000 francs de marchandise, ils donneraient un rendement de 6 %, supérieur au taux de l’intérêt, Mais notre producteur se gardera de doubler ainsi sa production ; car avançant 200.000 francs au lieu de 100.000, il verrait son gain annuel tomber de 15.000 francs à 12.000 francs !

7. C. Dans ce qui précède, je n’ai envisagé que la production des richesses, j’ai considéré que l’intérêt de la société voulait une production aussi abondante que possible, sans tenir aucun compte de la manière dont les richesses pouvaient se distribuer entre les individus, ni du nombre des individus, lequel n’est pas sans entretenir de certains rapports avec la distribution, sans

  1. Voir, dans L’utilité sociale de la propriété individuelle, les trois premiers chapitres de la section I de la première partie.
  2. On voit par ceci en quel sens il convient de parler de conflits de l’intérêt particulier et de l’intérêt général qui existeraient dans l’ordre de la capitalisation. Le conflit A est spécial à cet ordre : il tient à ce que la comparaison du présent et du futur, comparaison qui est de l’essence de la capitalisation, ne s’établit pas tout à fait de même pour l’individu et pour la société, à ce que le futur, illimité pour la société, est borné pour l’individu. Mais les conflits B et C ne sont pas spéciaux à l’ordre de la capitalisation : ils apparaissent dans les productions capitalistiques pour les mêmes raisons et de la même manière qu’ils peuvent apparaître dans les productions non capitalistiques, s’il en est de telles.