Page:Langlois - Anecdotes pathétiques et plaisantes, 1915.djvu/82

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
80
anecdotes pathétiques et plaisantes

La revanche du turco.

Un turco eut la bonne fortune de capturer un officier allemand. Il le désarma soigneusement, et c’est avec une fierté légitime qu’il le ramenait sur l’arriére, lorsque l’officier, violent et colérique, injuria notre turco. Celui-ci se demanda d’abord s’il allait abattre comme une bête cet énerguméne. Il fit mieux : il l’humilia. Et, à ses yeux, l’humiliation la plus complète qu’il pouvait infliger à son insulteur fut de l’obliger à porter son sac et tout son fourniment.

Sous la menace de la fine aiguille du lebel, le Prussien dut s’exécuter, et c’est en triomphateur que le turco le conduisit au camp… après l’avoir coiffé de sa gamelle. Bonne histoire qui fait la joie de ces naïfs enfants ! Mais disons-nous qu’il faut avoir une belle âme pour oser faire des « blagues » de caserne alors qu’autour de soi butinent mille abeilles de plomb.


Amadou, tirailleur sénégalais[1].

Amadou est un tirailleur sénégalais, originaire de Dakar, couleur de nuit, avec des yeux qui brillent comme des étoiles.

Blessé au cours d’un des récents combats autour d’Arras, il est soigné dans un hôpital auxiliaire, un véritable palais, sur une hauteur de la banlieue la plus proche de Paris.

Amadou n’admet pas les détours et les manières de la guerre moderne. Par exemple, il ne comprend pas qu’il y ait dans une bataille des moments où le meilleur soldat doive se coucher pour laisser passer les balles.

  1. Raconté par Jean Aubrat dans la Liberté.