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Je suis l’ennemi convaincu du baccalauréat, que je considère — passez-moi le mot violent — comme un malfaiteur[1].

Est-il bien certain que ce soit le diplôme qui mérite une qualification aussi sévère ? J’en doute un peu.

Le même M. Lavisse a expliqué dans une conférence publique les origines des programmes actuels du baccalauréat.

Du baccalauréat, régulateur des études, le programme a été rédigé, à Paris, par des hommes très compétents, très mûrs, trop compétents, trop mûrs : je suis un de ces messieurs. Nous l’avons déduit de conceptions coutumières, qui peuvent avoir vieilli, comme nous-mêmes, sans que nous le sachions. Ce programme, nous le modifions assez souvent, il est vrai, preuve que nous ne sommes jamais tout à fait contents, et cette inquiétude nous est une circonstance atténuante. Mais à travers toutes les modifications, nous gardons des principes fixes : celui-ci, que l’éducation qui a formé des hommes comme nous, est la meilleure de toutes évidemment et que nous en devons le bénéfice aux générations futures ; celui-ci encore, qu’il faut que tout écolier sache toutes choses à un moment donné : le grec, le latin, le français, une langue étrangère, l’histoire, Ia géographie, la philosophie, les mathématiques, la physique, la chimie, l’histoire naturelle, l’astronomie, tout en un mot, et quelques autres choses encore[2].

En résumé, l’élève est censé savoir par cœur une Encyclopédie complète. Comme il ne peut évidemment en retenir qu’une faible partie, l’examen est pour lui uniquement une question de chance. C’est ce que nous montre très bien M. Lavisse. Après avoir constaté que la façon dont on fait passer l’examen est « scandaleuse », il ajoute :

Bien que je puisse affirmer que les jurys ont, en somme, des habitudes de large indulgence, — si large qu’être bachelier cela ne signifie à peu près rien, — il est certain que, dans l’examen

  1. Enquête, t. I, p. 40. Lavisse, professeur à la Sorbonne.
  2. Lavisse. Conférence sur le baccalauréat.