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cette grande facilité qu’ils ont de les croire : car comme on voit qu’ils prennent plaisir à en entendre parler, qu’ils les écoutent avec étonnement et avec admiration et qu’ils regardent toutes ces choses comme des vérités bien constantes, les hipocrites de leur côté et les imposteurs du leur prennent plaisir à leur forger des fables et à leur en conter tant qu’ils veulent. Voici comme le Sr de Montagne[1] parle de ceci : » Le vrai champ et le sujèt de l’imposture, dit-il, sont les choses inconnuës : d’autant qu’en prémier lieu l’étrangeté même donne crédit ; et puis n’étant point sujètes à nos discours ordinaires, elles nous ôtent les moïens de les combattre. À cette cause, dit Platon, est-il bien plus aisé de satisfaire, parlant de la nature des Dieux, que de la nature des Hommes ; parce que l’ignorance des auditeurs prête une belle et large carrière, et toute liberté au maniment d’une matière cachée. Il advient de là qu’il n’est rien cru si fermement que ce qu’on sait le moins, ni gens si assurés que ceux qui nous content des fables. Et quoique la varieté et discordance continuelle des Evénemens les rejette de coin en coin et d’Orient en Occident, ils ne laissent de suivre pourtant leur brisée et du même craïon peindre le blanc et le noir. Y a-t’-il, dit il, opinion si bizarre[2] (je laisse à part la grossière imposture des Religions de quoi tant de grandes nations et tant de suffisans personnages se sont vûs enivrés) y a-t’-il, dit-il, opinion si bizare et si étrange que la coûtume et imposture

  1. Ess. de Montagne Liv. 1. Ch. 31. pag. 182
  2. ibid. pag. 78.