Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/175

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Chappitre Le
Du chevalier qui eut III femmes


Belles filles, je vouldroye que vous sceussiez et eussiez bien retenu l’exemple d’un chevalier qui ot troys femmes. II fut un chevalier moult preudomme et de bonne vie qui avoit un oncle hermite, saint homme et de religieuse vie. Ce chevalier eut sa première femme qu’il ama à merveilles. Si va advenir que la mort, qui tout prent, la print, dont le chevalier fut si dolent que a peu qu’il n’en mourut de dueil et de couroux. Si ne savoit son confort prendre fors que aler soy complaindre à l’ermite son oncle, que il savoit saint homme. Si vint a lui plourant et doulousant et regrettant sa femme, et le saint hermite le confortoit le plus bel qu’il povoyt, et au fort le chevalier le pria à jointes mains que il voulsist Dieu prier que il sceust se elle estoit perdue ou sauvée. Le saint homme eut pitié de son neveu et ala en la chappelle et adoura Dieu, et requist que il lui pleust lui demonstrer où elle estoit, et quant il eut esté grant pièce en oroison, il s’endormi et lui fut advis qu’il veoit la povre ame devant monseigneur saint Michiel et l’ennemy de l’autre part, et estoit en une balance et son bien fait avec elle et d’autre partie l’ennemy avec les maulx qu’elle avoit faits, et, entre les autres choses, la chose qui plus pesoit et qui plus la grevoit, c’estoient