Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/344

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tout sans déranger les autres racines. On a ordinairement, pour cet objet, une serre obscure, dite jardin d’hiver. Les racines de chaque espèce sont stratifiées par lits alternatifs avec du sable sec. Elles conservent ainsi toute leur fraîcheur, et les qualités qui les distinguent ou les font estimer ne sont nullement altérées par le contact d’autres objets.

Le meilleur moyen de conservation, c’est certainement la dessiccation, puisqu’elle a pour résultat l’évaporation de l’eau de végétation, laquelle est un agent puissant de désorganisation. Mais on ne peut employer ce moyen que dans des cas très-rares, et sur de petites quantités. C’est ainsi que, dans certains Cantons, on dessèche les oignons et les carottes, que l’on expédie sur la capitale pour les apprêts culinaires. On se sert, pour cela, d’une étuve ou d’une touraille à drèche.

La dessiccation est encore le seul moyen de conservation employé pour certaines plantes commerciales, telles que la garance et la rhubarbe ; nous en parlerons à la culture spéciale de ces plantes. Antoine, de Roville.

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Art. iv. — De la conservation des fruits.

Il appartient à l’horticulture et à l’économie domestique d’indiquer les moyens de conserver, pendant plus ou moins longtemps, les fruits qui parent nos desserts à diverses époques de l’année. Ici, nous devons nous borner à quelques préceptes généraux applicables aux fruits que les agriculteurs peuvent avoir occasion de récolter en grandes masses, tels que les pommes, les poires, les châtaignes, les noix, les olives et quelques autres. Les moyens spéciaux de conservation comme de récolte, de quelques-uns de ces fruits, trouveront place dans les articles qui traiteront des détails de leur culture.

Il est généralement reconnu qu’on doit laisser sur les arbres le plus tard possible, jusqu’en novembre si les froids le permettent, les fruits dont l’usage doit se continuer pendant longtemps. Quand ils ont été cueillis, on les laisse en tas pendant quelques jours, pour les laisser suer et se ressuyer ; on les place ensuite dans divers lieux pour les conserver.

La plupart des moyens de conservation reposent sur le principe qu’on évite la fermentation et la pourriture en interdisant le renouvellement de l’air et l’accès de l’humidité. Il n’est pas moins indispensable de mettre les fruits à cidre ou à couteau à l’abri des gelées. En général, dans les fermes, on se borne à placer les fruits dans les greniers, par couches peu épaisses, sur de la paille, et on les recouvre encore de paille lorsque les froids se font sentir ; dans quelques établissemens bien ordonnés, il existe des fruitiers proprement dits, où les fruits sont rangés par espèces sur des étagères, ou entassés dans des compartimens, des boites, des tonneaux, par couches alternatives, avec du son, des cendres, du sable desséché au four, des balles d’avoine, de la mousse, etc.

Ce moyen de conservation nous conduit à citer, comme l’une des meilleures pratiques lorsqu’on doit l’appliquer à de grandes quantités de fruits, de les placer, comme les racines, dans des celliers secs et frais. Enterrés dans des fosses, bien préservés de l’humidité, on les a trouvés parfaitement sains et frais une année après qu’ils avaient été récoltés. On peut alors appliquer aux fruits des dispositions analogues à celles prescrites précédemment pour les racines, en faisant observer, toutefois, qu’il est beaucoup plus nécessaire que le terrain où on les enterre soit parfaitement sec, élevé, et à l’abri de toute humidité. Les couches de fruits ne doivent pas être trop épaisses, et il est indispensable qu’on puisse les retirer partiellement, sans que toute la masse soit exposée au contact de l’air, qui rend leur altération très-prompte. — M. Morisot a proposé pour cet usage un silo qu’on pourrait adopter. Il consiste en une fosse dont on garnit le fond et les parois de paille longue, assujettie au moyen de gaulettes et de petites chevilles. Au fond on place ensuite un fort châssis en charpente, sur lequel sont superposées, jusqu’à la partie supérieure, qui est fermée de planches et recouverte d’une couche épaisse de terre, des caisses plates à claire-voie, dans lesquelles les fruits sont déposés. De cette manière, ces fruits se trouvent isolés les uns des autres, à peu près comme sur les étagères d’un fruitier, et parfaitement à l’abri des alternatives atmosphériques de sécheresse, d’humidité, de froid ou de chaud. C.-B. de M.

Section iii. — Du battage et du nettoyage des grains.

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Art. ier. — Du battage des grains.

La séparation des grains de la paille, l’égrenage, est une des opérations les plus importantes de l’agriculture : de la manière dont on l’exerce, dépend en grande partie, le profit que le cultivateur retire de son exploitation. Il influe essentiellement sur la qualité du produit tant en grain qu’en paille ; il rend cette opération plus ou moins coûteuse, et met le produit plus tôt ou plus tard à la disposition du propriétaire.

Cette opération s’exécute par le battage au fléau, par le dépiquage, ou par l’égrenage. C’est l’homme qui manie le fléau ; c’est au moyen du piétinement des animaux que le dépiquage a lieu ; ce sont les machines qui effectuent l’égrenage. Le battage au fléau, quoique très-lent, est le procédé le plus généralement répandu, et celui qui probablement disputera le plus longtemps le terrain aux machines qui le remplacent très-avantageusement presque dans toutes les localités et dans presque toutes les circonstances ; ce que nous indiquerons, en montrant d’un côté les nombreux et graves inconvéniens inhérens au battage, et de l’autre, les avantages que procurent les machines à battre, dont l’efficacité est prouvée par l’expérience.

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§ ier. — Du battage au fléau.

Pour se faire une idée de la fatigue que le battage cause à l’ouvrier qui l’exécute, il