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AGRICULTURE : DES LÉGUMINEUSES À SEMENCES FARINEUSES.


mange ses graines, malgré leur petitesse, de la même manière que celles de la précédente espèce, sous le nom de Teff. — On a pensé que la rapidité de croissance de cette plante pourrait la rendre, dans la France méridionale, aussi utile qu’elle l’est en Abyssinie, où on peut manger au bout de 40 jours le produit d’un semis, et où l’on en fait jusqu’à 3 dans une année lorsque la saison est favorable.

L’ALPISTE ou Phalaride des Canaries (Phalaris Canariensis), graine des Canaries (voir la fig. au chap. des Plantes fourragères), a un épi terminal, ovale ou à peu près cylindrique, assez épais ; — des balles glabres à courts pédoncules. — Quoiqu’on le regarde comme originaire des Canaries, on le retrouve fréquemment à l’état sauvage sur plusieurs points de la France, notamment en Bourgogne, dans le Lyonnais et le Languedoc. Il se plait de préférence dans les prés humides.

Les voyageurs rapportent que, dans les îles dont je viens de parler, cet alpiste servait autrefois de nourriture aux habitans qui en font encore des bouillies fort bonnes, comme cela a lieu aussi dans certains cantons de l’Espagne, de l’Italie et même de la France méridionale. Mais, dans tous ces pays, lorsqu’on le cultive en petit, c’est principalement pour en donner la graine aux oiseaux. Il est moins productif que beaucoup d’autres graminées tout aussi propres à cette destination. — Une propriété particulière, qui, si elle était bien reconnue, augmenterait cependant probablement la culture de cette plante, c’est que la farine de ses graines paraît être préférable à toute autre pour faire la colle destinée à affermir la chaîne des tissus fins, parce qu’elle conserve plus longtemps son humidité.

Le phalaris des Canaries aime les terres légères, chaudes et pourtant substantielles. Sa végétation s’accomplit rapidement au sud de l’Europe ; — assez lentement, au contraire, dans les régions du nord, puisqu’en Angleterre il ne fleurit que vers le mois de juillet et ne parvient à maturité que vers septembre ou octobre. Dans la plupart des contrées où on le cultive, on le sème à la manière de l’avoine ou de l’orge. En Angleterre, il paraît qu’on le sème en rayons distans d’un pied les uns des autres, dans le courant de février.

La ZIZANIE (Zizania aquatica), riz de Canada, improprement folle-avoine, — Zizanie claveleuse de Bosc, est, d’après cet auteur, une plante monoïque annuelle, qui s’élève, en Caroline, dans les eaux stagnantes et boueuses, à la hauteur de 7 à 8 pieds. — Ses fleurs sont disposées en panicules terminales, les mâles à la partie supérieure, et les femelles à la partie inférieure. Celles-ci sont remplacées par des graines qui n’ont pas moins de 7 à 8 lignes (0m 016 à 0m 018) de long, et qui sont regardées comme un excellent manger. Le même agronome dit que, les ayant mâchées, il les a trouvées plus farineuses qu’aucune de celles de la famille des graminées, et que les sauvages, avant l’arrivée des Européens, en faisaient cuire avec leur viande en guise de riz. — Aussi fait-il des vœux pour que cette belle et utile plante soit introduite dans les parties méridionales de l’Europe, où elle réussirait certainement.

Les graines de Zizania aquatica, dit M. Loudon, contribuent encore essentiellement à la nourriture des tribus errantes d’Indiens, et à celle d’immenses troupeaux de cygnes, d’oies et d’oiseaux d’eau de diverses sortes, qui affluent de toutes parts dans les marais du nord de l’Amérique. Parkinson s’étonne, tant il a vu cette plante productive dans les climats les plus rigoureux, et en des positions complètement impropres à toute autre culture, que les Européens, habitans des parties les plus septentrionales du pays que je viens de citer, n’aient encore fait aucune tentative pour propager et améliorer une production végétale qui semble destinée par la nature à devenir un jour le pain du nord. Oscar Leclerc-Thoüin.


CHAPITRE XVI. — Des légumineuses à semences farineuses.

Section 1re . — Des fèves.

Si les fèves, ou plutôt les féverolles, dont nous devons nous occuper d’une manière spéciale dans un Traité d’agriculture, ne sont pas plus généralement cultivées en France, cela tient surtout à ce que, dans beaucoup de lieux, on ne trouverait pas à vendre avantageusement leurs produits, et on ne saurait pas les utiliser, comme ils peuvent l’être, à la nourriture journalière et à l’engrais des animaux domestiques.

Chacun connaît l’emploi des fèves à la nourriture de l’homme. — La féverolle ou fève de cheval, ainsi que ce nom l’indique, est particulièrement propre à celle des chevaux, qui la mangent mêlée à de l’avoine ou à des fourrages hachés, sans nulle autre préparation. — Réduite en farine grossière, elle peut faire partie de leurs breuvages, et servir très-avantageusement à engraisser rapidement tous les ruminans, les porcs et les animaux de basse-cour. Cette farine, facilement obtenue au point de finesse voulu, à l’aide du petit moulin Molard, est une des plus riches en parties nutritives.

Dans le département de Lot-et Garonne, les fèves sont, après le froment et le maïs, le principal objet de la culture. Celles qui cuisent bien, dit M. de Père, ont une valeur égale à celle du froment ; elles forment presque exclusivement la soupe des habitans de la campagne, qui les emploient à cet usage en si grande quantité, qu’elles remplacent en