Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, II.djvu/56

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
42
liv. ii.
CULTURES INDUSTRIELLES : DES PLANTES ECONOMIQUES.


petit enfoncement dans la bande retournée, et dont l’autre dépose dans ce creux les graines de betteraves et les recouvre de terre ; on fait ensuite passer un rouleau.

Dans les terres humides, on fait, à l’aide du buttoir, des sillons espacés de 2 pieds environ, et c’est sur la crête de ces sillons qu’on place les graines.

Dans le département du Nord, la semaille à la houe est la plus usitée ; un cordeau, tendu au moyen de deux piquets, guide un ouvrier qui, faisant entrer un des angles d’une petite houe en terre, pratique une raie de quelques pouces de profondeur ; après cette ligne il en ouvre une deuxième, et ainsi de suite. Une femme suit et dépose dans la première ligne les graines qu’elle prend d’une main dans un panier, les répartit également en faisant constamment jouer le pouce sur les doigts ; une seconde femme recouvre les graines en promenant alternativement les deux pieds sur la raie. L’homme et la première femme doivent marcher en sens contraire, afin qu’arrivant en même temps aux deux extrémités du champ, ils puissent ôter ensemble les piquets du cordeau et les reporter à la ligne suivante.

En pépinières, pour repiquer lorsque le plant est parvenu à une certaine grosseur, manière qui est avantageuse lorsqu’on veut hâter le développement des betteraves, ou lorsqu’on doit les placer dans un sol humide, froid, ou dans des terres très-sales, mais qui impose une transplantation longue, dispendieuse, et qui, en faisant presque toujours perdre aux racines leur pivot, les empêche de s’alonger et leur fait produire une multitude de radicules nuisibles à leur valeur. — Au reste, quel que soit le mode d’ensemencement adapté, le cultivateur doit toujours se réserver quelques milliers de betteraves en pépinière, afin de pouvoir regarnir les vides et remplacer les plantes qui viendraient à périr.

Dans la culture pour transplanter, il faut choisir pour la pépinière un terrain très-riche, parfaitement préparé et bien fumé, même une portion de jardin ; on y répand la semence à la volée ou dans des rayons distans de 4 à 5 pouces, et de manière qu’il y ail de 6 à 8 plants par pied de longueur ; on calcule qu’il faut pour la pépinière le 10e de la surface à repiquer, quantité qu’on pourrait peut-être réduire.

Le repiquage a lieu du 15 mai au 15 juin, lorsque le plant a environ la grosseur du petit doigt ; il y a un grand avantage, dit Schwerz , à faire le repiquage de bonne heure et avec du gros plant, qui résiste aux sécheresses, tandis que le petit périt infailliblement. Avant de repiquer, on coupe les feuilles à 3 ou 4 pouces au-dessus du collet, en ménageant seulement les petites feuilles du cœur. On profite autant que possible, pour le repiquage, d’un temps pluvieux ; cependant il ne faut pas trop différer la transplantation. Lorsqu’on le peut, l’arrosage, avec de l’eau ou avec du purin, est très-avantageux. — Le repiquage s’exécute au plantoir et à la charrue. Pour le repiquage au plantoir, il faut enlever l’extrémité de la racine, qui, en se recourbant, nuirait au développement. On donne au plantoir la longueur qui doit séparer les plants les uns des autres ; armé de cet instrument, chaque ouvrier suit une raie, et pratique un trou assez profond pour que la racine y pénètre jusqu’au collet : il dépose dans ce trou un plant, il serre la terre tout contre, en enfonçant le plantoir une ou deux fois à côté du trou ; puis il termine en appuyant le pied tout près du plant afin d’affermir la terre. — Le Repiquage à la charrue se fait comme pour le Colza (voyez ci-devant, page 4), excepté qu’au lieu de garnir tous les sillons, on n’en garnit qu’un sur trois, en supposant le labour exécuté à 9 pouces. Le plant est couché contre la bande retournée et couvert lorsque la charrue repasse ; il n’y a plus alors qu’à venir presser la terre contre la racine avec le pied.

La méthode du semis en pépinière avec repiquage est peu usitée en France et dans les grandes cultures de la Flandre ; elle est, au contraire, adoptée dans presque toutes les contrées de l’Allemagne, où la betterave est cultivée en grand, et M. de Dombasle la recommande hautement. Ses partisans et ses détracteurs appuient leur sentiment par de très-bonnes raisons qu’il faut abandonner au jugement souverain de la pratique.

Les binages et sarclages fréquens sont la garantie de la prospérité des racines, comme de l’heureux résultat des cultures sarclées pour le nettoiement et la préparation de la terre. Ils sont de première nécessité pour la betterave, et c’est particulièrement sous ce rapport qu’il y a un avantage immense à les cultiver en rayons, l’économie dans les frais de main-d’œuvre s’élevant à plus de moitié.

Dès que les feuilles ont atteint la longueur d’un pouce à un pouce et demi, on procède au premier sarclage. « Aucune plante, dit M. de Dombasle, ne souffre autant que la betterave du retard ou de la négligence apportée dans ce premier sarclage ou dans ceux qui doivent le suivre.» Le premier sarclage a toujours lieu à la main ; on se sert de la serfouette (fig. 327, Tome 1, page 225) on pourrait aussi se servir avec avantages du sarcloir-Hugues (id. fig. 326). — Pour le second, qui se donne quinze jours ou trois semaines plus tard, ou peut encore employer ce sarcloir ou la houe à cheval ; mais, comme dans les cultures subséquentes, et surtout dans les terres dont la surface se durcit facilement, on est toujours obligé de biner à la main dans les ligues. — On doit avoir soin de ne commencer les binages qu’après que la rosée a disparu, ou, s’il a plu, qu’après que la terre est suffisamment ressuyée sans cependant être déjà devenue sèche ou durcie.

L’Éclaircissage des plants s’exécute lors du premier ou du deuxième sarclage. Cet arrachage est une opération indispensable, assez délicate quand plusieurs plantes se touchent, et qui demande à être faite avec attention, en appuyant au pied de celles qu’on veut conserver, et tirant les autres sur le côté en les inclinant. Il doit laisser les plants dans les lignes à 8 ou 10 pouces, et même à 5 ou 6 si l’on veut obtenir des racines moyennes.

Le nombre des sarclages et binages d’entretien est difficile à déterminer : on peut dire