Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/161

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de Constance à Antioche pendant les événements de la Gaule.

(2) À son retour de Mésopotamie, les premiers d’entre les tribuns, et d’autres personnes de rang, vinrent lui faire leur cour. Dans le nombre était un ex-tribun nommé Amphiloque, Paphlagonien de naissance, qui avait longtemps servi sous l’empereur Constant, et qu’on soupçonnait, avec grande vraisemblance, d’avoir jadis semé la discorde entre les deux frères. Cet homme, d’un air arrogant, attendait son tour. Mais on le reconnut, et il ne fut pas admis. Sur quoi plusieurs courtisans firent grand bruit de ce qu’ils appelaient indulgence excessive. Un rebelle aussi obstiné ne méritait même pas, disaient-ils, qu’on lui laissât voir le jour. Mais Constance, avec une mansuétude qui ne lui était pas ordinaire, leur dit : "Laissez vivre cet homme. Je ne le crois pas innocent, mais il n’est pas convaincu. Et s’il est en effet coupable, il trouvera sa punition dans mon regard et dans le cri de sa conscience." Tout se borna là.

(3) Le lendemain, au cirque, ce même homme assistait aux jeux, et s’était, suivant son habitude, placé en face de l’empereur. Au moment où commençait le spectacle, la balustrade sur laquelle il s’appuyait, avec quelques spectateurs, se rompit ; et tous furent précipités. Un certain nombre ne reçut que de légères blessures ; mais Amphiloque, qui s’était brisé les vertèbres, fut trouvé mort sur la place ; et Constance triompha de sa prophétie.

(4) Ce fut l’époque de son mariage avec Faustine. Depuis longtemps déjà il avait perdu Eusébie, sœur des consulaires Eusèbe et Hypace. Cette princesse, d’une beauté supérieure, rehaussée des qualités morales les plus rares, était restée accessible aux sentiments d’humanité au faîte des grandeurs. Nous avons dit que c’était à sa protection constante que Julien était redevable de la vie, et, subséquemment, de son élévation au rang de César.

(5) Constance songea vers le même temps à dédommager Florence, que la crainte des suites de la révolution avait chassé des Gaules. Anatole, préfet du prétoire en Illyrie, étant venu à mourir, on envoya Florence remplir sa place ; et il revêtit les insignes de sa haute dignité en même temps que Taurus, nommé aux mêmes fonctions en Italie.

(6) On pressait cependant à la fois les préparatifs de la guerre étrangère et de la guerre civile. La cavalerie se renforçait de nouveaux escadrons. Pour recruter les légions, on ordonna des levées dans les provinces. Chaque ordre de l’État, chaque profession fut taxée pour fournir des vêtements, des armes, des machines, soit en argent, soit en nature, ainsi que pour approvisionner l’armée de vivres de toute espèce, et la pourvoir de bêtes de somme.

(7) Le roi de Perse n’avait fait retraite qu’à contre-cœur devant l’impossibilité de tenir campagne en hiver ; et l’on s’attendait de sa part aux plus énergiques efforts dès que la température serait adoucie. Des députés avec de riches présents furent donc envoyés aux rois et aux satrapes des contrées transtigritaines, pour s’assurer de leur concours, ou du moins de leur neutralité franche et sincère.

(8) On s’efforça notamment de gagner à force de dons, et surtout par l’envoi de riches vêtements, les rois Arsace et Méribane, l’un d’Arménie, l’autre d’Ibérie, dont la défection en pareille circonstance eût porté à l’empire un coup fatal.