Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/195

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d’Asie par la frontière de la province syrienne. Sa limite au couchant est la mer Issiaque, nommée aussi par quelques auteurs mer Parthénienne.

(3) Arrêtons- nous un moment au Nil, le plus bienfaisant de tous les fleuves, qu’Homère appelle Égyptus ; nous parlerons ensuite des autres merveilles de cette contrée.

(4) Je crois que le principe des grandes eaux du Nil ne sera pas plus connu de la postérité qu’il ne l’a été jusqu’à ce jour. Les poètes se contredisent dans leurs fictions comme les savants dans leurs conjectures sur ce mystérieux phénomène. Je vais extraire des uns et des autres les explications qui me paraissent les plus probables.

(5) Quelques physiciens prétendent que les masses de neiges condensées par les hivers hyperboréens s’amollissent ensuite par l’influence d’une température adoucie, et se vaporisent sous la forme de nuages qui, chassés vers le midi par les vents étésiens, se résolvent en eau sous un climat plus ardent, et deviennent ainsi la cause première des crues du Nil.

(6) D’autres affirment que ses inondations périodiques n’en ont pas d’autre que les pluies qui tombent en abondance en Éthiopie pendant les grandes chaleurs de l’été. L’une et l’autre explication doit être erronée ; car on assuré qu’il ne pleut jamais en Éthiopie, ou qu’il n’y pleut qu’à de longs intervalles.

(7) Il est une troisième opinion plus accréditée : c’est que le gonflement du fleuve est dû à l’action des vents prodromes et étésiens, qui refoulent ses flots durant quarante-cinq jours, pendant lesquels son cours ainsi violemment retenu, et luttant contre l’obstacle, élève ses eaux à cette hauteur prodigieuse, et les fait se répandre comme une mer sous laquelle disparaissent les campagnes.

(8) De son côté, le roi Juba soutient, sur la foi des livres puniques, que le Nil sort d’une montagne de Mauritanie, voisine de l’Océan ; et la preuve en est, dit-il, que les similaires des plantes, des poissons et des quadrupèdes vivant dans le fleuve ou sur ses bords, se retrouvent tous dans les eaux ou sur le sol de cette contrée.

(9) Quand le fleuve a parcouru l’Éthiopie, recevant différents noms des diverses régions qu’il traverse, il arrive, avec un volume d’eau déjà considérable, à ce qu’on appelle les cataractes. C’est une ligne continue de rochers à pic qui barre son cours, et du haut desquels il roule ou plutôt se précipite avec un tel fracas, que les Ates, peuplade qui habitait autrefois dans le voisinage, furent contraints d’émigrer pour aller vivre dans un séjour moins bruyant, parce qu’ils perdaient la finesse de l’ouïe.

(10) Son cours est ensuite plus tranquille ; et, après avoir traversé toute l’Égypte, le fleuve se décharge dans la mer, sans s’être grossi d’aucun affluent, par sept branches distinctes, dont chacune a la largeur et l’utilité d’une rivière. Il se ramifie de plus en un grand nombre de bras ou canaux de diverse importance, dont sept, qui ont un cours navigable, ont été respectivement désignés chez les anciens par les noms d’Héracléotique, de Sébennitique, de Bolbitique, de Pathmitique, de Mendésien, de Tanitique et de Pélusiaque.

(11) Ces bras forment au- dessous des cataractes diverses îles, dont quelques-unes sont si étendues que le fleuve met