Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/200

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souvent maladroite, le rôle d’un roquet jappant contre un lion.

(17) Aux noms que j’ai cités on pourrait en ajouter bien d’autres. L’esprit scientifique, loin d’être éteint dans Alexandrie, y fleurit encore chez un grand nombre de professeurs distingués. La géométrie y poursuit utilement ses découvertes ; la musique y a toujours des zélateurs, et l’harmonie des interprètes. On y compte encore des astronomes, bien qu’ils soient devenus plus rares. La science des nombres y est généralement cultivée, ainsi que l’art de lire dans l’avenir.

(18) Quant à la médecine, dont notre intempérance rend les secours si souvent indispensables, elle y a fait notoirement de tels progrès, qu’il suffit à un médecin de dire qu’il a étudié à Alexandrie, pour qu’on ne lui demande pas d’autres preuves de capacité. En voilà trop peut-être sur ce sujet.

(19) Mais quiconque cherche à approfondir la notion si ardue de l’essence divine, ou s’enquiert de la cause de nos sensations, reconnaîtra que les principes de ces hautes théories ont été importés d’Égypte.

(20) Les premiers d’entre les hommes, les Égyptiens, ont remonté au berceau de toute idée religieuse ; ils en conservent dans leurs livres sacrés les origines mystérieuses.

(21) C’est chez eux que Pythagore a puisé sa doctrine, et les éléments de cette institution fondée sur l’autorité d’une communication divine (ce qu’il confirmait par l’exhibition de sa cuisse d’or à Olympie, et, plus tard, par ses colloques avec un aigle).

(22) C’est de là qu’Anaxagore avait rapporté cette faculté d’intuition qui lui fit prévoir que des pierres tomberaient du ciel, et prédire un tremblement de terre rien qu’en touchant la vase du fond d’un puits. C’est encore aux lumières des prêtres d’Égypte qu’il faut faire remonter les admirables lois de Solon, et par suite, en grande partie, les rudiments de la jurisprudence romaine. Platon aussi avait vu l’Égypte, et c’est là qu’il avait puisé cette haute sagesse qui l’égale à Jupiter lui-même.

(23) Généralement les Égyptiens ont le teint brun et même basané. Leur physionomie est sombre, leur corps maigre et sec. Ils sont prompts à prendre feu à tout propos, processifs, et chicaneurs impitoyables. Un Égyptien qui aurait payé l’impôt rougirait de ne pouvoir montrer les marques du fouet employé contre lui comme moyen de contrainte. La torture n’a pas encore trouvé de combinaison qui puisse arracher son nom à un voleur de ce pays.

(24) On sait, et nos annales en font foi, que l’Égypte était précédemment un royaume dont les souverains étaient nos alliés, et qu’Octavien Auguste en prit possession à titre de province romaine, après avoir défait Antoine et Cléopâtre dans le combat naval d’Actium. La Libye aride nous est échue par le testament de son roi Apion ; et Cyrène, ainsi que le reste des villes de la Pentapole, sont un don du dernier Ptolémée. Mais il est temps de terminer cette digression trop longue, et de revenir à notre sujet.


Traduction sous la direction de M. Nisard, Paris Firmin Didot, 1860
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