Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/282

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Cicéron.

(9) Cette contrée nourrissait jadis des peuples barbares différents de mœurs et de langage, dont les plus redoutés étaient les Odryses, si altérés de sang humain que, lorsqu’ils n’avaient pas d’ennemis à combattre, ils tournaient au milieu de leurs repas, ivres de vin et gorgés de nourriture, le fer contre leurs propres membres.

(10) Lorsque la puissance romaine eut pris de l’accroissement sous le gouvernement des consuls, Marcus Didius, à force de persévérance, parvint à vaincre cette nation jusqu’alors indomptée, et vivant sans culte et sans lois. Drusus ensuite sut la contenir dans ses limites naturelles. Minucius l’accabla dans une grande bataille sur les bords de l’Hèbre, qui prend sa source dans les montagnes des Odryses ; et ce qui en restait fut écrasé dans un dernier combat par le proconsul Appius Claudius. Des flottes romaines alors s’emparèrent des villes du Bosphore et de la Propontide.

(11) Après ces généraux parut Lucullus, qui, dans une seule expédition, abattit la rude nation des Besses, et réduisit, malgré leur vive résistance, les montagnards de l’Hémus. Sa valeur fit passer toute la Thrace sous le joug de nos ancêtres, et, par cette conquête longtemps disputée, ajouta six nouvelles provinces au territoire de la république.

(12) La première de ces provinces, qui, par le nord confine à l’Illyrie, est la Thrace propre, que décorent les grandes villes de Philippopolis et de Béroé. La province de l’Hémus comprend Andrinople, qu’on appelait autrefois Uscudama, et Anchialos. Vient ensuite la Mysie, où l’on trouve Marcianopolis, ainsi appelée du nom de la sœur de Trajan, Dorostorus, Nicopolis et Odessus. Plus loin est la Scythie, dont les cités les plus peuplées sont Dionysopolis, Tomes et Callatis. Enfin, la province appelée Europe est la dernière de la Thrace du côté de l’Asie. Elle compte, outre ses municipes, deux autres villes remarquables, Apri et Périnthe, nommée par la suite Héraclée.

(13) La province de Rhodope est limitrophe de cette dernière. Ses villes sont Maximianopolis, Maronée et Aenus, qu’Énée bâtit et ensuite abandonna, pour aller, sous de meilleurs auspices, et après avoir longtemps erré sur les mers, fonder un établissement éternel en Italie.

(14) Il est généralement reconnu que les montagnards de cette contrée ont sur nous l’avantage d’une constitution plus saine et plus robuste, et d’une vie plus longue. La raison en est, dit-on, qu’ils mangent froid, et que leurs corps, rafraîchis continuellement par la rosée, aspirent un air plus pur, participent plus immédiatement de l’influence vitale des rayons du soleil, et que les vices n’ont pas encore pénétré chez eux. Je reprends mon récit.

Chapitre V

(1) Après la défaite de Procope en Phrygie, lorsque l’ordre fut partout rétabli, Victor, maître de la cavalerie, fut envoyé chez les Goths pour savoir quel motif avait pu déterminer cette nation amie, et qu’un traité sincère unissait aux Romains, à seconder de leurs armes une entreprise dirigée contre leurs princes légitimes. Ceux-ci, pour se justifier, produisirent une lettre où Procope établissait son droit à l’empire comme étant du sang de Constantin ; et ils ajoutèrent que s’ils