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Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/328

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dans la suite, une correspondance de ce dernier avec Macrien et autres chefs Alamans fut surprise par Florence, duc de Germanie, et la torture arracha l’aveu de cette trahison au coupable, qui périt du supplice du feu.

Chapitre V

(1) Ici le mélange des faits contemporains amènerait une confusion inévitable. J’ai jugé à propos de suivre d’une teneur le fil du récit.

(2) Nubel, le plus puissant des petits souverains de Mauritanie, venait de mourir, laissant plusieurs enfants tant de sa femme que de ses concubines. Zammac, l’un de ces derniers, qui avait la faveur du comte Romain, fut tué en trahison par son frère Firmus, ce qui causa une rupture et la guerre, par suite des cabales du comte pour venger le meurtre de sa créature. II paraît qu’à la cour de l’empereur on se donna beaucoup de mouvement pour faire arriver au prince, appuyés de commentaires dans le même sens, les rapports envenimés que Romain lui adressait contre Firmus, tandis qu’on avait grand soin d’écarter tout ce qu’alléguait celui-ci pour sa justification. "L’empereur, disait le maître des offices Rémige, parent et fauteur de Romain, a des préoccupations autrement graves : il faut mieux choisir son temps pour appeler son attention sur des pièces aussi insignifiantes."

(3) Le Maure finit par s’apercevoir des intrigues qui empêchaient sa défense d’être prise en considération ; et craignant de se voir, nonobstant ses bonnes raisons, traité en rebelle, il prit le parti de se constituer lui- même en insurrection.

(4) On s’était donc attiré un ennemi irréconciliable, qu’il fallait se hâter d’abattre avant qu’il étendît ses moyens de nuire. On dépêcha en Afrique, avec un faible détachement de la maison militaire, le maître de la cavalerie Théodose, que ses éminentes qualités désignaient pour cette préférence. C’était un caractère de la trempe des Domitius Corbulon et des Lusius, que leurs faits d’armes ont rendus si célèbres sous les règnes de Néron et de Trajan.

(5) Théodose, parti d’Arles sous les plus heureux auspices, passa la mer avec la flotte dont il avait pris le commandement, et prit terre à Igilgili, dans la Maurétanie Sitifienne, avant même qu’on eût vent de son départ. Le hasard lui fit rencontrer là le comte Romain, avec lequel il conversa d’un ton doux, sans toucher que légèrement aux reproches auxquels s’attendait ce dernier. Il le chargea même d’organiser un système de postes et de gardes avancées dans la Mauritanie Césarienne.

(6) Mais dès que Romain fut parti, Théodose donna l’ordre à Gildon, frère de Firmus, et à Maxime d’arrêter son lieutenant Vincent, qui était notoirement complice de ses spoliations et de ses crimes.

(7) L’arrivée d’une partie du corps expéditionnaire était retardée par des obstacles de navigation. Mais sitôt qu’il fut réuni, Théodose se rendit à Sitifis, où il enjoignit aux protecteurs de lui répondre de la personne de Romain et de ses domestiques. De grands tourments d’esprit l’agitèrent durant son séjour dans cette ville. Quel moyen de mouvoir sur ce sol brûlant des soldats habitués à la température des régions boréales ? Comment joindre de près un ennemi rapide et insaisissable, et dont toute la tactique est de surprendre, sans jamais accepter le combat en ligne ?