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Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/172

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qu’au moindre signe du tyran ils ravageaient tout dans le pays, et personne n’osait résister à leur fureur. D’où il arriva que plusieurs pays et plusieurs puissants seigneurs se rendirent tributaires du tyran pour éviter la rage de ces forcenés[1].

XXIX
Comment le susdit tyran fut tué.


L’an 1262, Allau[2], roi des Tartares, assiégea le château du tyran, dans le désir de chasser un si méchant et si dangereux voisin de ses États, et il le prit avec tous ses assassins au bout de trois ans, les vivres leur manquant ; et après les avoir fait tous tuer, il fit détruire le château de fond en comble.

XXX
De la ville de Chebourkan.


En sortant dudit lieu, l’on vient dans un beau pays, orné de collines et de plaines, de fort bons pâturages et d’excellents fruits. La terre en est très fertile, et il n’y manque rien excepté l’eau, car il faut faire quelquefois cinquante et soixante milles pour en trouver, ce qui fait que les voyageurs sont obligés d’en porter avec eux, aussi bien que pour les bêtes. Il faut donc traverser ce pays-là le plus vite que l’on peut, parce qu’il

  1. L’histoire du Vieux de la Montagne, que Marco Polo fit connaître un des premiers en Europe, est restée fameuse. Elle a donné lieu à un grand nombre de recherches et d’écrits historiques, ainsi qu’à beaucoup de compositions romanesques. En réalité, ce prince redoutable était le chef d’une secte dite des ismaéliens, qu’il avait fondée. « Il se faisait passer, dit M. Pauthier, pour avoir une puissance surnaturelle et être le vicaire de Dieu sur la terre. » Il mourut trente-quatre ans après son entrée dans le château fort d’Alamont, sans en être sorti une seule fois, passant sa vie à lire et à écrire sur les dogmes de sa secte et à gouverner l’État qu’il avait créé.
  2. Allau ou Houlagou, frère utérin de Mangu-Khan, prédécesseur de Koubilaï. — Voy. Rubruquis chap. XLIV.