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Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/257

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que ne l’a été le Nil : c’est que le Nil fut, sans doute, le seul dieu que ses propres prêtres crussent possible, le redoutant. » Pour remplir « noblement », en toute conscience, sa fonction d’interprète des divins décrets du Nil, le pharaon avait à sa disposition un infaillible moyen : imiter scrupuleusement l’exemple de ses prédécesseurs, surtout dans ce que cet exemple présentait de plus incompréhensible. Ainsi s’expliquent, à mon avis, le traditionalisme à outrance, le ritualisme rigide et méticuleux, l’imitation servile du passé qui constituaient le fond de la morale et des mœurs égyptiennes.

Memphis, la résidence du pharaon, se nommait aussi la « demeure de la divinité », Ha-ka-Ptah, dont les auteurs classiques ont fait Ægyptos : en conséquence on a souvent affirmé que, déjà de son vivant, le pharaon était regardé comme dieu, mais pour que cette thèse fût scrupuleusement vraie, il faudrait que les Égyptiens eussent possédé une conception de Dieu distincte de celle des pharaons ; or les archéologues ont eu beau fouiller tous les recoins du panthéon des premières dynasties, ils n’y ont trouvé, sauf les rois morts et leurs images, que deux autres occupants : le bœuf, l’animal de labour par excellence, et le bélier dont plus tard, à l’époque des Ptolémées, les cornes ornèrent le front du Jupiter Ammon, si vénéré dans tout l’empire méditerranéen. Il semble donc que les Égyptiens ne furent amenés à l’idée de Dieu qu’en projetant, pour