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LA CIVILISATION ET LE GRANDS FLEUVES.

livre du Chou-king, le Yu-koung, rôle ou registre des taxes dressé par Yu, est celui de tous les ouvrages classiques de la Chine dont l’authenticité soulève le moins de doute[1]. On sait que le Yu koung raconte avec certains détails comment du haut de la montagne de l’Oreille de l’Ours, Hioung-eur-Chañ, Yu, après avoir dompté les eaux débordées, après les avoir enfermées dans les lits du Hoang-ho, du Yangtse-kiang et du Hañ-kiang, et rendu ainsi la terre habitable, procéda à l’organisation de l’État, qu’il divisa en neuf provinces dont il fit graver les cartes sur des vases de bronze ; comment il institua la tenure du sol et taxa les habitants de chaque province en raison de la fertilité du territoire, etc.

L’étude de ce curieux document a permis à Richthofen de dresser une carte de la marche probable de la colonisation et de la civilisation chinoise dans les temps anciens. Cette marche est conforme à celle que nous pouvons induire de la nature des lieux : groupées au cœur des « Terres Jaunes » au confluent du Hoang-ho et du Ouei-ho, les Cent Familles sont arrêtées, à l’ouest et au nord par les nomades et par le peu de ressources que le pays offre à la culture ; à l’est, par le Fleuve, si difficile à dompter. La mer les repoussant de son littoral encore inhabitable, elles se dirigent vers le Yangtse

  1. Authenticité relative, il est vrai, car l’ouvrage a été certainement remanié par les Confuciens pour les besoins de leur cause ; mais le Yu-koung n’a pas été inventé de toutes pièces : il reflète les traditions d’un passé lointain, et ses indications topographiques sont d’une précision remarquable.