Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/98

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C’est surtout dans le domaine si intéressant, mais à peine défriché, de l’anthropogéographie[1], que l’analyse doit être patiente et attentive : une méthode sévère peut seule nous préserver de ces généralisations hâtives et banales, de ce fétichisme des faits accomplis, du succès à tout prix de la force brutale qui, depuis quelques années, a envahi la science sous le couvert du glorieux pavillon de la sociologie dite darwinienne ou évolutionniste.


Après l’analyse, la synthèse : ici, nous pourrions citer en exemple les pages imagées de J. Michelet sur la physionomie géographique particulière de chacune des provinces françaises, et son influence sur les destinées historiques. Plus tard, Thomas Buckle, avec moins de sentiment poétique, mais plus de méthode apparente, a tâché de préciser la part qui revient aux conditions du sol, du climat, en un mot, du milieu géographique, dans l’histoire politique et sociale de l’Angleterre, de l’Écosse, de l’Espagne. Son œuvre, imparfaite à certains points de vue, mais originale et féconde, est malheureusement restée inachevée. M’engageant sur la voie ouverte par ces grands maîtres, mais sans me limiter à tel et tel pays, je voudrais présenter au lecteur un essai de synthèse géographique s’appliquant aux phénomènes de la distribution inégale et

  1. L’ouvrage de M. Ratzel, paru en 1883 sous le titre d’Anthropogéographie, semble avoir acquis à ce mot le droit de cité dans le langage scientifique.