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INVASION

sa retraite. À qui devait rester la Gaule ? Aux Goths et aux Burgundes, ce semble. Ces peuples ne pouvaient manquer d’envahir les contrées centrales, qui, telles que l’Auvergne, s’obstinaient à rester romaines. Mais les Goths eux-mêmes n’étaient-ils pas romains ? Leurs rois choisissaient leurs ministres parmi les vaincus. Théodoric II employait la plume du plus habile homme des Gaules et se félicitait qu’on admirât l’élégance des lettres écrites en son nom. Le grand Théodoric, fils adoptif de l’empereur Zénon et roi des Ostrogoths établis en Italie, eut pour ministre le déclamateur Cassiodore. Sa fille, la savante Amalasonte, parlait indifféremment le latin et le grec, et son cousin Théodat, qui la fit périr, affectait le langage d’un philosophe.

Les Goths n’avaient que trop bien réussi à restaurer l’Empire. L’administration impériale avait reparu, et avec elle tous les abus qu’elle entraînait. L’esclavage avait été maintenu sévèrement dans l’intérêt des propriétaires romains. Imbus des idées byzantines dans leur long séjour en Orient, les Goths en avaient rapporté l’arianisme grec, cette doctrine qui réduisait le christianisme à une sorte de philosophie, et qui soumettait l’Église à l’État. Détestés du clergé des Gaules, ils le soupçonnaient, non sans raison[1], d’appeler les Francs, les barbares du Nord. Les Burgundes, moins intolérants que les Goths, partageaient les mêmes craintes. Ces défiances rendaient le gouvernement

  1. App. 77.