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Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/218

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HISTOIRE DE FRANCE

Cette guerre, si bien conduite, ne fut pas moins sagement terminée. On ôta au duc de Bourbon ce qu’il avait au centre (Corbeil, Vincennes, etc.), et l’on éloigna le dauphin ; on lui donna un établissement sur la frontière, le Dauphiné ; c’était l’isoler, lui faire sa part ; on ne pouvait en être quitte qu’en lui donnant, par avance d’hoirie, une petite royauté[1].

Cette Praguerie de France (on la baptisa ainsi du nom de la grande Praguerie de Bohême) n’en eut pas moins, quoique finie si vite, de tristes résultats. La réforme militaire fut ajournée. Les Anglais enhardis prirent Harfleur et le gardèrent. Ils lâchèrent le duc d’Orléans, à la prière du duc de Bourgogne[2]. L’ancien ennemi de sa maison s’employant ainsi pour le tirer de prison, le roi ne put décemment se dispenser de garantir aussi la rançon et d’aider à la délivrance du dangereux prisonnier. Il descendit tout droit chez le duc de Bourgogne, qui lui passa au col la chaîne de la Toison-d’Or et lui fit épouser une de ses parentes. Contre qui se faisait une si étroite union de deux ennemis, sinon contre le roi ? Il se tint pour averti.

D’abord, il obtint des États un dixième à lever sur tous les ecclésiastiques du royaume. Il rappela Tannegui Duchâtel, l’ennemi capital de la maison de Bourgogne. Puis, portant toutes ses forces vers le Nord, il vint le long de la frontière faire justice des

  1. Mss. Legrand.
  2. Malgré l’opposition du duc de Glocester. La raison qu’il donne pour retenir le duc d’Orléans est assez curieuse. Elle prouve que les Anglais croyaient alors le roi et le dauphin (Louis XI) tout à fait incapables. (Rymer, 2 juin.)