Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/103

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moitié de l’autre ; mais, quant aux souffrances, elle la valait bien.

Au point du jour, La Ronde fit sa reconnaissance et trouva que le camp était environ à trois ou quatre cents mètres sur la gauche. Tout y marquait le désordre le plus fâcheux. Ainsi que Cheadle l’avait deviné, les loups s’en étaient partagé les dépouilles. Ils avaient fait disparaître presque toutes les provisions arrangées sur un traîneau ; à côté, celle de Miscouépémayou, une petite provision de morceaux de choix, préparée et empaquetée avec le plus grand soin, était dévorée. Heureusement que ce qu’on apportait faisait à peu près la compensation de ce qu’on avait perdu. Les chevaux furent donc remis aux traîneaux, et l’on reprit aussi vite que possible la route,du fort Milton.

Le retour ne laissa pas que d’être aussi 1ent qu’ennuyeux. Il n’y avait pas eu à la vérité de dégel régulier ; mais la chaleur du soleil avait fondu la neige sur les penchants des coteaux, sur les pentes méridionales ; et le tirage des traîneaux sur la terre était si harassant pour les chevaux, qu’on ne voyageait qu’à petites journées et que pas à pas. On vint à un endroit où la route traversait un grand lac. La neige y avait aussi presque complétement disparu, et les chevaux glissaient tellement sur la glace, qu’il fallait renoncer à l’espoir de passer par là. La monture lilliputienne de Miscouépémayou, dont les pieds étaient aussi petits que ceux d’un daim, était tout à fait incapable de se tenir sur cette surface glissante, et, pendant quelque temps, on fut réduit à croire qu’on serait obligé de la sortir d’embarras en la tirant par la queue sur la terre ferme. On avait dû dételer les traîneaux. Il fallut d’abord les pousser à la main à travers le lac ; puis se tailler une route à travers les bois qui en bordaient les rives pour conduire les chevaux : à l’extrémité opposée. Toute une matinée y passa, et ce ne fut que dans la soirée du cinquième jour de voyage qu’on regagna la Belle-Prairie, après une absence de douze journées.