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Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/253

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nante agilité avec laquelle il se glissait au milieu des troncs les plus rapprochés ou dépassait les barricades d’arbres renversés. Aucun obstacle ne semblait arrêter sa course. Quant à nous, empêchés de toute façon, nous ne parvenions que, de loin en loin, à revoir nos chevaux comme des taches sur la surface du torrent. Environ deux milles plus bas, un autre haut fond leur permit encore de prendre pied et donna le temps à L’Assiniboine de les rejoindre. Cependant le courant avait une telle force qu’il ne tarda pas à les entraîner de nouveau. Mais Bucéphale qui avait vu L’Assiniboine tourna de son côté. L’endroit formait un épouvantable rapide où les eaux se précipitaient en faisant d’énormes bouillons sur les grosses pierres qui obstruaient leur course. À l’instant où Bucéphale passait non loin du rivage, L’Assiniboine, sautant dans l’eau, jeta ses bras au col de l’animal qui hennit de plaisir en voyant son libérateur venir à son aide ; et tous deux, l’un supportant l’autre, finirent par gagner le bord. Le succès de L’Assiniboine nous sembla miraculeux et nous eûmes soin de récompenser amplement l’intrépidité qu’il avait déployée en cette circonstance. Il y a bien peu d’hommes qui auraient osé se précipiter dans un pareil torrent, et lorsqu’après l’événement nous considérions les énormes vagues qui roulaient à cet endroit, nous nous demandions comment L’Assiniboine avait pu si bien réussir.

Après avoir déchargé Bucéphale et déballé tout son bagage trempé pour le sécher au soleil, nous poussâmes en avant dans l’intention d’apprendre quel avait été le destin de l’autre cheval, Giscouékarn ; il s’était obstiné à se tenir dans un milieu qui, en cette circonstance, se trouvait le plus dangereux parti qu’il eût à suivre. Nous courûmes un autre mille et nous l’aperçûmes sous la rive opposée, à un endroit trop escarpé pour qu’il y pût monter ; la tête ensevelie dans les buissons qui bordaient la berge, il manquait à peu près de forces pour résister à la violence du torrent. Ç’aurait été de la folie que d’essayer de passer sur