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Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/292

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Nous étions emprisonnés : d’un côté, la rivière ; de l’autre, des hauteurs si escarpées et si embrouillées qu’il nous semblait impossible de les escalader, car cette entreprise avait échoué déjà toutes les fois que nous l’avions tentée ; nous ne pouvions plus avancer ; nous ne pouvions pas reculer. Il ne nous restait qu’à camper et à chercher un moyen de franchir l’obstacle. Les quatre jours précédents, depuis que nous avions quitté le marais, nos chevaux n’avaient pas vu d’herbe ; ces trois dernières journées, ils s’étaient soutenus en mangeant la mousse et les lis qui poussaient entre les rochers. Toute la nuit, ils errèrent çà et là ; ils entraient et sortaient en passant entre nous, ou, si nous étions couchés, en passant par-dessus. Leur agitation eut pour conséquence naturelle que M. O’B. ne put pas non plus dormir et qu’il nous éveilla à chaque instant en sautant sur ses pieds et en chassant les chevaux avec son gros bâton. Les pauvres animaux arrachaient la mousse des rochers ; avant le jour, ils avaient fait disparaître toute la verdure qui était à leur portée. Dès que le soleil se leva, l’infatigable Assiniboine partit à la recherche d’un sentier, tandis que nous chargions les chevaux en attendant son retour. Il arriva une heure ou deux plus tard et nous dit que les difficultés du pays devenaient toujours plus inextricable, mais qu’avec de la prudence nous pouvions faire franchir aux chevaux l’escarpement opposé. Cette nouvelle nous enleva la peur d’être forcés d’abandonner ici nos bêtes et de faire à pied le reste de notre voyage. Il nous fallut conduire les chevaux un par un, pour leur faire grimper en zigzag le flanc de la hauteur, sur des roches moussues et glissantes. Des accidents nous arrivèrent, qui, sans être aussi nombreux que dans quelque autre occasion, peuvent donner l’idée de ceux que nous éprouvions journellement. Tous les chevaux avaient réussi à franchir le dangereux précipice, à l’exception de celui que conduisait Cheadle et de Bucéphale, qui fermait la marche sous la direction de M. O’B. Le zigzag que nous parcourions avait à peu près un