Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/34

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cet endroit, la rivière se resserrait, le courant tournait la pointe avec une vélocité doublée par les obstacles ; et la tête de leur canot virant de bord malgré toute leur énergie, ils se mirent à redescendre de plus belle.

Nos infortunés étaient près de quitter la partie en désespérant de la gagner, lorsqu’ils virent l’autre canot accourir vers eux. Deux hommes le montaient et prouvaient, par leur habileté à manier l’aviron, qu’ils étaient des mariniers expérimentés. Lorsqu’ils eurent accosté, l’un des rameurs changea de place avec Cheadle. Alors les deux bateaux habilement dirigés, rasant la rive, évitant soigneusement le lit du courant, revinrent pour la quatrième fois, mais avec facilité, à l’endroit critique. Ici la lutte reprit tout son intérêt. À chaque instant,entraînés quelques mètres en arrière ils remontaient toujours à la charge. Finalement, ils atteignirent victorieusement le côté du bateau.

Le capitaine eut la bonté de s’arrêter une demi-heure pour nous laisser le temps de faire un bon dîner. Nous apprîmes alors que très-probablement il ne serait pas de retour avant une semaine et nous obtînmes de lui une nouvelle provision de farine et de porc salé ; puis nous nous remîmes en route. Bientôt nous rencontrâmes Rover, qui avait pris terre beaucoup plus bas et qui rentra en sautant dans un de nos canots. Il y avait plusieurs jours que nous continuions notre descente lente et monotone, où nous étions souvent obligés de nous arrêter pour réparer nos barques détraquées, quand nous nous décidâmes à essayer encore un voyage nocturne. La nuit commença belle, avec un ciel plein d’étoiles. Une heure ou deux après, des nuages menaçants s’élevaient de l’ouest et les ténèbres devenaient plus épaisses. Cependant nous allions toujours, espérant bien qu’il n’y aurait pas de tempête. Mais bientôt l’obscurité devint complète. Ce fut, à notre sens, un changement subit. Alors, sans que rien l’eût annoncé, un éclair