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Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/344

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Après avoir passé Clinton, où aboutit une route qui va par Yale, le chemin recommence à monter. Sur notre droite, nous vîmes un abîme extraordinaire. Il commence à l’extrémité septentrionale par une dépression graduelle, devient une profonde fissure qui sépare les rochers sur une longueur d’environ un quart de mille, et finit brusquement dans la vallée, au sud. Cette espèce de faille a quatre ou cinq cents pieds de large sur autant de profondeur. Les flancs en sont unis et perpendiculaires comme si les rochers en avaient été coupés en deux. La route cependant montait toujours, et, au bout de quelques milles, elle nous mena sur le plateau, composé d’un sol sablonneux et stérile, où poussent de petits sapins en grand nombre, et qu’entre-coupent une quantité de lacs. Tout le long du chemin, les logements avaient été assez misérables ; mais ils devinrent abominables après Clinton. La seule couche qu’on trouvât était le plancher des auberges ou maisons au bord de la route, qu’on rencontrait presque à chaque dizaine de milles et qui n’ont pas d’autre nom qu’un certain numérotage en rapport avec la borne de poste la plus voisine, comme la maison du cinquantième ou du centième mille. Nos uniques couvertures rembourraient assez peu les inégalités des planches mal taillées et nous protégeaient médiocrement contre les froids vents-coulis, qui sifflaient entre les ais mal joints de la porte. Une auberge, sur la route des mines, ne se compose que d’une hutte de troncs mal équarris, formant une seule chambre. À une extrémité, s’ouvre une large cheminée, et, sur un côté, s’élève un comptoir derrière lequel sont posées des planches qui supportent des rangées de bouteilles pleines de boissons alcooliques les plus communes. Suivant la saison, en allant aux mines ou en revenant, les mineurs, hommes de toutes nations, Anglais, Irlandais, Écossais, Français, Italiens et Allemands, Yankees et nègres, Mexicains ou hommes nés dans les îles de l’océan Pacifique, arrivent vers le soir par bandes de deux ou trois, se débar-