Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/84

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sant le terrain de deux pieds, ce qui rendait notre demeure beaucoup plus chaude. Les interstices que laissaient les troncs furent comblés avec de la boue mêlée de gazon battu, pour lui donner de la solidité. Mais la cheminée fut l’occasion des méditations les plus longues et les plus pénibles. Nous n’avions pas découvert d’argile propre à cimenter les cailloux dont on fait les cheminées dans la forêt, et nous commencions à être très-effrayés de la perspective de nous voir au milieu des fortes gelées sans que notre foyer eût été terminé. Il est clair que ç’aurait été insupportable, car nous trouvions déjà désagréable de travailler avec du mortier non détrempé, et, s’il venait à geler, nous serions évidemment forcés d’y renoncer tout à fait.

Enfin, après avoir enlevé plusieurs pieds de riche terre glaise, nous découvrîmes un sol argileux dont nous nous accommodâmes, et la cheminée s’éleva rapidement. Comme elle était presque terminée, nous y allumâmes du feu, et déjà nous nous félicitions de notre pleine réussite lorsque, patatras ! tout tomba par terre. Quelle consternation ! Pendant quelque temps, nous ne sûmes plus que faire. Une discussion animée s’ouvrit sur l’art d’élever une construction plus solide. La Ronde ni Bruneau ne pouvaient se consoler de leur incontestable échec. À les entendre, l’argile était mauvaise et nous devions ne pas songer désormais à nous en servir. Cependant il n’y avait plus de temps à perdre. Il nous fallait réparer le dommage ou nous résigner à rester sans foyer, quand le thermomètre serait descendu au-dessous de zéro. Ce fut Milton qui se chargea de l’opération. D’abord il fit un cadre en bois vert pour supporter l’argile. Pendant ce temps, Cheadle, avec un cheval et une charrette, recueillait une provision des pierres les plus rectangulaires qu’il pouvait trouver. Grâce à ces matériaux, notre cheminée fut solidement bâtie et brava toutes les rigueurs de l’hiver.

Comme nous étions occupés de ces travaux, nos amis indiens nous firent plusieurs visites ; mais ils avaient cessé de nous in-