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Page:Noailles Le Livre de ma vie.djvu/30

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CHAPITRE II


Nuit d’angine. — M. et Mme Philibert. — Le 14 Juillet. — La Marseillaise. — La reine Victoria sur la Corniche. — Un fidèle du comte de Chambord. — Le lac de Genève. — L’exilé de Prangins. — Bonaparte, j’aime en vous… — Napoléon bâtisseur et devin. — L’astre du héros. — Le séducteur illimité.




Jamais l’idée ne me vint que mes parents fussent des étrangers. Sur quoi établissais-je ce sentiment d’unité entre eux et le pays qui m’avait vue naître ? Les parents, en ce temps-là, ne parlaient pas beaucoup à leurs petits enfants ; ils étaient fiers de leurs dons, de leur aspect, mais s’en remettaient de tous les soins et de tous les éclaircissements aux bonnes et aux gouvernantes. Très malade d’une angine supportée avec le rude et nécessaire courage de la petitesse, je vis tout un soir des serviteurs m’entourer tendrement, et c’est vers minuit seulement qu’apparut, au pied de mon lit, ma mère, ravissante, coiffée d’un feutre de couleur crème que voilait un tulle pâle où se cachait une rose thé. Les médecins, amoureux d’elle, lui avaient intimé l’ordre de se distraire, d’aller au