Grecs, initiait l’enfant de Sophocle et d’Euripide. Ce qu’il y a de furieux, d’inévitable, de sanglant dans le drame racinien, s’accordait avec ma violence encore assoupie, et la liquidité de lave torride des vers de Racine m’enivrait comme du brûlant Mozart :
Grâces au ciel mes mains ne sont point criminelles.
Plût aux dieux que mon cœur fût innocent comme elles !
En ces mêmes promenades sur le lac, je lisais Corneille dans une édition exiguë, dont les caractères devenaient indéchiffrables au jour tombant, mais sur quoi je gardais rivés mes yeux fatigués, auxquels l’opiniâtreté prêtait une énergique acuité. Le poète, le héros, me conquérait par la fierté inflexible, le tragique puissant, le duel somptueux du dialogue ample ou rapide. Qui est né au pays de Corneille et a écouté sa voix vit et meurt selon ses commandements. Dans les conflits du cœur, ses leçons stoïques se dressent en nous, comme l’ange sévère, à l’épée flamboyante, debout devant les portes de l’Éden, et obtiennent notre soumission. Que j’ai aimé à répéter pour moi-même tel cri musical de Chimène :
L’assassin de Rodrigue ou celui de mon père !
Il y a, dans la poésie de Corneille, une toge de pourpre que nulle autre œuvre que la sienne ne