Page:Pétrarque - Lettres de Vaucluse, trad. Develay, 1899.pdf/48

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gager mon cou d’un nœud invétéré et de sortir vainqueur d’un si rude combat. Tandis que cette femme blessée veut faire main basse sur son esclave fugitif et fond sur lui avec larmes, tandis que ses yeux brillant d’un doux éclat voilent à dessein leurs feux et leurs traits, que de fois, hélas ! elle m’a forcé de tomber indécis sur la route que je suivais !

Que faire donc ? Par quels moyens lui résister ? Elle me préparera de nouveau de plus lourdes chaînes. Je m’enfuis et je me mets à parcourir tout l’univers. J’osai traverser les tempêtes de l’Adriatique et de la mer de Toscane, je ne craignis point de confier à une barque tremblante ma tête arrachée au joug. Quel mal une mort prématurée pouvait-elle me faire à moi vaincu par les souffrances et las de la vie ? Je me dirige vers le couchant, et la cime des Pyrénées me voit d’en haut caché dans ses herbages exposés au soleil. L’Océan me voit aussi là où le soleil, fatigué de sa course, baigne dans la mer d’Hespérie son attelage fumant et où, découvrant le mont pétrifié par un regard de Méduse[1], il projette du haut des rochers une ombre immense

  1. Le mont Atlas.