gues, qui, jadis fameuse par elle-même, s’il est
permis de se glorifier de peu avec un ami, c’est-à-dire avec soi, est devenue plus fameuse par le
long séjour que j’y fis dans la suite et par mes
vers. En entendant cela, nous eûmes, nous aussi,
le désir enfantin d’y être conduits. Et comme
nous ne paraissions pas pouvoir être confiés sans
danger à des chevaux, on nous donna des domestiques chargés de les diriger, en nous tenant,
comme cela se fait, serrés dans leurs bras. Pendant que cette mère, la meilleure de toutes celles
que j’ai connues, ma mère par le sang et notre
mère à tous deux par la tendresse, que nous
avions fini par gagner avec bien de la peine,
faisait en tremblant mille recommandations, nous
partîmes avec cet homme dont le souvenir seul
est agréable, dont vous portez le nom et le prénom que vous avez rehaussés par le savoir et
la réputation. Lorsqu’on fut arrivé à la fontaine
de la Sorgues (je m’en souviens comme si c’était
aujourd’hui), frappé de la beauté extraordinaire
des lieux, entre autres réflexions d’enfant, je dis
comme je pus : « Voilà l’endroit qui convient le
mieux à ma nature, et si un jour cela se peut, je
le préférerai aux grandes villes. » Je me disais
alors tout bas ce que plus tard, quand j’atteignis
Page:Pétrarque - Lettres de Vaucluse, trad. Develay, 1899.pdf/9
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