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SECONDE GUERRE MÉDIQUE.

le pressentiment soudain, l’impression unanime et irrésistible qui s’empare, au même instant, d’une armée ou d’une multitude ; l’élan qui emporte et le cri qui part sans mot d’ordre ; l’idée qui jaillit, rapide comme la lumière, de milliers d’âmes qui n’en font plus qu’une ; l’acte de foi qui éblouit les esprits d’une foule, comme un éclair d’évidence. Aucun messager, aurait-il eu les pieds d’Achille ou de Phédippide, n’aurait pu porter, en trois heures, à Mycale, l’annonce de la victoire de Platée. Tous les Grecs rassemblés sur cette rive asiatique n’en eurent pas moins la révélation qu’une grande bataille, désastreuse pour l’armée des Perses, avait été livrée le matin même, dans une plaine de la Béotie. Un signe visible confirma ce bruit surnaturel ; on vit flotter un caducée de héraut, poussé par la vague occidentale sur la plage. Phémé arrivant au but de sa course l’avait sans doute laissé tomber dans la mer. Les Grecs, exaltés par ce prodige, chargèrent aussitôt l’ennemi.

L’attaque fut irrésistible, et Athènes en donna l’élan. Tandis que les Spartiates, entamant la côte par un sentier raviné, s’attardaient à tourner l’ennemi, les Athéniens sautaient sur le rivage et l’abordaient de plain-pied. Comme à Platée, les Perses les attendaient, un genou en terre, l’arc au poing, sous la toiture d’osier de leurs boucliers plantés dans le sol par des fers