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ESCHYLE.

ges de la Mer Rouge » des anciennes fresques, où l’on voit des têtes à couronnes, des visages crispés et grimaçants sous leurs casques, flotter par places, hors des vagues. — Mais un poète grec ne peut s’empêcher de faire sourire la guerre même. Homère est plein, dans l’Iliade, de comparaisons pastorales qui adoucissent ses carnages. Au fort des mêlées, une image agreste métamorphose subitement les armées aux prises, « en un essaim abondant de mouches qui bruissent autour de l’étable du berger, lorsque le lait coule dans les vases ». Elles rappellent encore au poète, quand elles s’entre-choquent dans la poussière, « les pailles à travers les aires sacrées où vannent les vanneurs tandis que la blonde Déméter séparant à leur souffle le grain d’avec sa dépouille, on voit tout alentour les paillers blanchir. » Ici ce n’est qu’un mot, une épithète mélodieuse, « Salamine, l’île nourricière des colombes » ; mais la scène de massacre en est un instant éclaircie. Un long roucoulement se mêle à ses râles ; le golfe sanglant reflète un vol de ramiers effrayés, qui s’égrène dans l’azur de l’air.

« Voilà ceux dont les noms me reviennent », — dit le Messager en terminant son appel funèbre, — « mais je ne t’ai dit que très peu de nos pertes qui sont innombrables. » Alors Atossa lui demande de raconter l’action plus au long. À ce moment, par