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GRANDEUR ET DÉCADENCE DE BACCHUS.

prête à Lucifer, lorsque, du haut de son trône de pierre, un cierge planté entre ses deux cornes, il préside aux dévergondages du Sabbat.

III

Les fantasmagories sont familières à Bacchus. Il est, par excellence, un dieu thaumaturge, la magie est un de ses éléments. « Les démons tremblent au nom de Sémélé » dit l’inscription d’une mystérieuse pierre gravée ; combien plus au sien ! Les enchanteurs de l’Arioste et des contes de fées ne font que contrefaire ses miracles ; les Génies des Mille et une Nuits relèvent de son thyrse bien plus que de l’anneau du roi Salomon. C’est à ce sceptre verdoyant que tous les sorciers de l’antiquité et du moyen âge sont venus cueillir leurs baguettes. Le « Multiforme », le « Trompeur », ces deux surnoms sont au premier rang dans la liste de ses épithètes. C’est un jeu pour lui, comme pour l’ogre du Chat botté, de se changer en toute sorte d’animaux. Le taureau, dont il porte déjà les cornes, est une de ses métamorphoses habituelles. Les femmes d’Élis l’évoquaient ainsi aux fêtes du printemps : — « Viens, illustre ! dans ton auguste temple, accompagné des Grâces ; viens dans ton temple maritime, avec un pied de bœuf ! Ô bon