nant pour mère, non plus Clymène l’Océanide, mais Thémis elle-même, ce qui le fait en même temps fils de la Justice. Thémis avait donc pu transmettre au Titan, comme une arme extrême, l’arrêt du Destin ; et ce changement vraisemblable forme le nœud de la tragédie, en mettant le tyran à la merci de sa victime qui seule peut l’empêcher de périr.
Cet arrêt de déchéance éventuelle signifié au Roi de l’Olympe déconcerte l’esprit moderne habitué à la fixité de l’idée divine. On comprend les cris de révolte que le poète place dans la bouche de son Prométhée ; Job, sur son fumier, en pousse d’aussi forts. Mais prédire au Dieu suprême sa chute imminente, lui montrer le néant où il va tomber, et le successeur qui le détrônera de l’autel, l’impiété semble flagrante ; on s’étonne que les temples n’en aient pas frémi.
Le blasphème n’est point pourtant si hardi qu’on pourrait le croire. La conception de dieux absolus, éternellement parfaits et immuables, était étrangère à la race hellène. On retrouve déjà chez les Aryens, ses ancêtres, la croyance que le Ciel change comme la terre, qu’il a ses avènements et ses décadences, et que des dynasties divines s’y succèdent dans le cours des temps. — « Chantons, » — dit un Hymne du Rig-Véda — « les naissances des dieux qui, célébrés par nos voix, verront le jour dans l’âge a venir. Les dieux existants naissent de ceux qui