C’est à Eschyle que la tragédie dut son appareil et ses pompes. Machiniste et costumier, décorateur et maître de danses, il fut à la fois son poète et son architecte, son penseur et son ouvrier. Ce fut lui qui orna la scène de temples, de tentes, d’autels, de tombeaux, qui inventa les machines à l’aide desquelles l’illusion opère ses prestiges. L’enchanteur aux paroles magiques n’évoquait pas seulement la personne des dieux, mais aussi leur cortège et leur attirail, leurs chars aériens et leurs hippogriffes, leurs descentes sur la terre et leurs ascensions vers le ciel. Aux oripeaux bigarrés des premiers tréteaux, il substitua des robes si grandioses et si majestueuses qu’elles furent adoptées par les hiérophantes des Mystères et les porteurs de flambeaux sacrés. Il exhaussa le cothurne de façon à en faire un socle mouvant qui donnait à l’acteur une stature sculpturale. Il agrandit et il embellit la pantomime et le jeu des Chœurs, taillant dans leur masse des groupes pathétiques, dignes d’être coulés dans le bronze ou moulés par le marbre de la statuaire. Le poète s’en vante dans les Grenouilles d’Aristophane : — « Vous souvient-il d’avoir vu ces Phrygiens qui venaient chez Achille, avec Priam, pour racheter le cadavre d’Hector, et combien de figures diverses ils ont faites ? »
Avant lui, les masques étaient inanimés ou in-