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INTRODUCTION

néerlandais, l’ancien haut-allemand ont apporté aussi chacun leur contingent[1].

Voici, à titre d’exemples, quelques-unes des attributions faites par les germanistes :

Germanique en général : anche, banc, bedeau, bleu, bourg, braise, bramer, branc, bride, bru, choisir, cracher, écaille, échevin, éclater, épervier, étal, étriller, fauve, feutre, fief, gâcher, gagner, garde, gris, guérir, guerre, guet, guise, hareng, honnir, honte, jaillir, laid, lapin, latte, loge, marche, maréchal, marri, riche, rosse.

Germanique de l’est : barde (d’où bardeau), bur (d’où buron, hutte), butin, carcan, crique, douber (d’où adouber), esquif, frapper, gab, haler (d’où halage), hait (d’où souhait), hune, joli, limon (p. e. angl. sax.), targe, tille (d’où tilleul), varech.

Germanique de l’ouest : bande, baud (d’où baudet), bière (cercueil), gelde, v. fr. : treschier (danser).

Vieux-nord-francique : affre, beffroi, bouc, buer, canif, clenche, cruche, échec (butin), écrou, épeler, frimas, gaspiller, gauche, guerpir, guiper (d’où guipure), haie, halle, happe (d’où happer),

  1. Je suis ici Mackel, l’auteur du travail le plus scientifique que je connaisse sur la matière (Die germanischen Elemente in der französischen und provenzalische Sprache, Frz. Studien, VI (on y trouvera indiqués et critiqués les ouvrages antérieurs). Il marque lui-même avec quelles réserves il faut se prononcer en cette matière (p. 5) : « Nous sommes autorisés à considérer, que environ jusqu’à la fin du vie siècle… tous les dialectes germaniques ont eu une physionomie assez uniforme, bien entendu sous réserves des particularités phonétiques qui séparent d’une part le germanique de l’est du germanique de l’ouest, et de l’autre le germanique du nord (scandinave) du germanique de l’ouest, et ces deux du gothique d’autre part. Vouloir attribuer des emprunts de cette époque à un dialecte déterminé, risquerait d’être une entreprise infructueuse. »

    En fait il ne se permet d’attributions que dans une mesure qu’il détermine ainsi : « Dans le cas où les emprunts se retrouvent dans tout le domaine roman, je les ai cités sous l’étiquette germaniques, étant admis par sous-entendu que dans la plupart des cas chacune des langues romanes sœurs a emprunté le mot pour son compte du dialecte qui pour elle entre en ligne de compte, ainsi l’italien du gothique et du lombard, l’espagnol du gothique ; le provençal, du bourgondion et du gothique ; le français du nord, du francique et du bourgondion (plus tard aussi du haut-allemand et du vieux-nordique). Au vieux-francique et au bourgondion est attribué le mot d’emprunt, que seul le gallo-roman a emprunté ; il est attribué spécialement au vieux-francique seul, quand la forme du mot exclut un emprunt tardif, comme serait un emprunt au nordique. Avec le vieux-nordique concourt dans bien des cas l’anglo-saxon, qui peu de temps après a exercé son influence sur le français. Dans quelques cas, où le provençal seul possède le mot allemand, il est rapporté de droit au bourgondion. Au gothique sont rapportés spécialement les emprunts, dans les cas où la phonétique gothique permet d’expliquer les formes françaises et provençales. »