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L’ÉPOPÉE ANTIQUE

classiques sirènes, les trois fontaines faées (celle qui ressuscite, celle qui rend immortel et celle qui rajeunit[1]), les Otifals à tête de chien (peut-être distincts des précédents), les hommes fendus jusqu’au nombril, la pluie de feu que suit une tempête de neige, « au pertuis que clot Hercules Liber[2] », la forêt aux pucelles (qui sortent de terre au printemps comme des fleurs et y rentrent l’hiver)[3], où les conduisent deux vieillards (distincts des quatre précédents), la fontaine de Jouvence, les arbres du soleil et de la lune, qui annoncent à Alexandre sa mort prochaine, enfin les hommes qui vivent de l’odeur des épices.

Porus, instruit de la prédiction des arbres, croit le moment venu de se venger et provoque Alexandre. Dans deux duels successifs, il est d’abord blessé, puis tué, et son fief donné à Aristé ou Ariste, l’un des pairs. Divinuspater et Antipater reçoivent d’Alexandre l’ordre de le rejoindre à Babylone. Mécontents d’être troublés dans leur repos, ils complotent d’empoisonner le roi. Cependant celui-ci, pour plaire à la reine Candace, qui lui a fait savoir son amour et a chargé le peintre Apelles de faire son portrait, va attaquer le duc de Palatine, le ravisseur de sa bru ; il n’a pas de peine à le vaincre et le fait pendre, ce dont la reine le récompense par de riches présents et par l’octroi de ses faveurs. Ici se place le curieux épisode de l’ascension du héros dans les airs, à l’aide d’une nacelle de bois et de cuir frais tirée par des griffons auxquels il présente un morceau de viande au bout d’une lance, relevant celle-ci pour monter et l’abaissant quand la chaleur le force à descendre. Alexandre arrive devant Babylone, qu’il assiège. Après un assez long épisode de fourrage peu intéressant, imité du Fuerre de Gadres et dont l’imagination de l’auteur a fait tous les frais, Alexandre tue de sa main l’amiral et le fait enterrer avec honneur.

Alexandre apprend l’existence du royaume « d’Amasone »,

  1. La dernière de ces trois fontaines, signalées par les quatre vieillards velus et cornus, n’est rencontrée que plus tard, après la forêt aux pucelles. L’auteur du Roman a dû puiser à des sources inconnues, car la fontaine qui ressuscite figure seule dans une des rédactions grecques du Pseudo-Callisthènes.
  2. Il s’agit des bornes mentionnées plus haut, représentées par deux statues d’or dressées par Hercules et Liber (Bacchus), auxquelles Alexandre, à son retour, offre un sacrifice.
  3. Les femmes-fleurs, qu’on retrouve dans le poème de Lamprecht, mais qu’ignore le Pseudo-Callisthènes, sont d’origine orientale.