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Page:Petit de Julleville - Histoire de la langue et de la littérature française, t. 1, 1896.djvu/373

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ROMANS HISTORIQUES OU PSEUDO-HISTORIQUES

Antipater, avec intercalation, dans la plupart des manuscrits, des épisodes du duc Melcis[1] et du voyage d’Alexandre au paradis. La quatrième et dernière comprend la fin du Roman et doit être considérée comme un poème indépendant, non seulement à cause de certaines contradictions avec ce qui précède, mais encore parce que « le poète a fait usage de l’Historia de prœliis (voir ci-dessous), texte que les auteurs des trois autres branches ne paraissent pas avoir connu[2]. »

La première branche, dont l’auteur avoue qu’il ne fait que que « rafraîchir » sa matière, dépend étroitement, dans ses premières pages, de la rédaction en vers de dix syllabes que nous ont conservée deux manuscrits : Arsenal, 3472, et Venise, Museo civico, B. 5. 8. Dans ces manuscrits, « la partie décasyllabique (environ 800 vers) cesse avec la victoire d’Alexandre sur Nicolas. Entre cet événement et l’attaque de Tyr sont placées un certain nombre de tirades de raccord (au nombre de 14 dans Venise), qui les unes sont tirées de différentes parties du roman de Lambert le Tort et d’Alexandre de Paris, tandis que les autres, ne se rencontrant point ailleurs, semblent être l’œuvre de l’arrangeur qui a soudé le fragment décasyllabique avec le roman en alexandrins [3]. »

Les soixante-dix-sept tirades, à peu près égales entre elles, dont se compose la version décasyllabique sont l’œuvre d’un inconnu, qui écrivait dans la région sud-ouest, non loin des limites de la langue d’oc, et que M. P. Meyer considère comme un des meilleurs écrivains du moyen âge. « Le style, dit-il, bref, et coupé, comme c’est l’ordinaire dans les chansons de geste, est d’une rare fermeté ; l’idée, ordinairement comprise dans les limites d’une seule tirade, n’est jamais développée outre mesure. Les images poétiques, les descriptions brillantes, mais singulièrement précises, y abondent[4]. » Mais il est probable qu’il faut

  1. Plusieurs manuscrits mettent à la suite de cet épisode le poème des Vœux du paon de Jacques de Longuyon (voir § 3), qui est le plus souvent copié à part.
  2. P. Meyer, Rom., XI, 219.
  3. P. Meyer, Alexandre, etc., II, 107.
  4. Voir Alexandre, etc., II, 109, et pour le texte des deux mss. de l’Arsenal et de Venise, Ibid., I, 17 et 237. M. P. Meyer croit que le clerc Simon, qui se nomme dans la 2e tirade du ms. de Venise (laquelle manque dans celui de l’Arsenal), n’est que l’arrangeur qui a raccordé le roman en alexandrins au roman en décasyllabes en dialecte poitevin, probablement resté inachevé.