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LA RENAISSANCE

François Ier, qui commit tant de fautes (même décousues et contradictoires), fut, du moins, bien inspiré en favorisant les humanistes. Leur sincère reconnaissance a protégé sa mémoire contre un jugement trop sévère de la postérité. Déjà, quand il mourut, Théodore de Bèze voulait que les réformés lui pardonnassent pour avoir « chassé du monde la barbarie, et mis à la place les trois langues (le grec, le latin, l’hébreu) et les belles lettres ».

Joachim Du Bellay, dans la Défense et Illustration, qu’il écrit à vingt-quatre ans (âge ou l’on e^st ordinairement plus sévère pour les rois qui viennent de mourir), parle de lui avec une sorte de vénération : « Nostre feu bon Roy et Père, François premier de ce nom et de toutes vertus {ceci était exagéré). Je dy premier, d’autant qu’il a eu son noble royaume premièrement restitué tous les honneurs et sciences en leur ancienne dignité. »

Heureux monarque, à qui le Collège de France, annoncé plutôt que fondé, a fait pardonner tout, et même Pavie. Dès 1520, il promettait à Budé cette fondation magnifique. « Depuis que j’ay eu cet honneur d’haleiner le Roy, il luy est souvent advenu de déclarer publiquement, non par hazard, ains de bon sens et propos délibéré, qu’il vouloit bastir dedans Paris les villes de Rome et d’Athènes, pour y planter à bon escient la langue latine et la grecque, et tout d’une main immortalizer sa mémoire dedans la postérité. » Au seul bruit de cette promesse, tout l’humanisme avait frémi de joie : « Je croy facilement, écrit Budé à Tusan (depuis professeur du roi eu la langue grecque), ce que m’escrivez, que la promesse faite par le Roi d’ériger un nouveau collège, a resveillé en vous et vos semblables un désir indicible d’estude. Et combien que depuis on n’en ait rien fait ny parlé, toutesfois je ne fais aucune doute que ce nouveau project