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ANCIENS MÉMOIRES

fuyards, de peur de s’attirer un siege qui degenereroit bientôt dans le carnage de leurs habitans et le sac entier de Bressiere, Tandis que les Anglois, tout attenüez de fatigues et pouvans à peine respirer sous le faix dont ils étoient chargez, demeuroient arrétez aux portes de cette ville sans y pouvoir entrer, et craignoient que Bertrand qui les poursuivoit ne les atteignît bientôt, le commandant de la place, homme de bon sens et d’experience, les appella du haut des murailles, leur demandant ce qu’ils faisoient là, s’ils étoient Anglois ou François, et quel étoit le lieu dont ils étoient sortis. Un de ces Anglois prit la parole pour les autres, et le pria de leur ouvrir ses portes, parce qu’ils venoient de Saint Maur sur Loire, qu’ils avoient mieux aimé mettre en cendres que de souffrir qu’elle fût prise par Guesclin, qui tout écumant de rage et de fureur les poursuivoit avec tout son monde, pour assouvir sur eux son ressentiment. Il ajouta pour le toucher encore davantage, qu’ils étoient tous Anglois naturels et sujets du même prince que les habitans de Bressiere ; que les François, leurs ennemis, commandez par Bertrand leur marchoient déjà sur les talons, et qu’ils alloient être tous assommez sans qu’il en pût échapper un seul, s’il ne leur faisoit la charité de les mettre à couvert du danger qui les menaçoit, en leur donnant retraite dans sa place. Ce gouverneur apprehendant que le prince de Galles ne luy fît un jour quelque reproche de son inhumanité s’il laissoit ainsi ce peu d’Anglois à la discrétion de leurs ennemis, leur promit qu’il leur ouvriroit ses portes à condition qu’ils passeroient cinquante à cinquante, et ne coucheroient point dans Bressiere. Les Anglois furent trop heureux d’accepter ces offres ;