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SUR DU GUESCLIN.

dans le fonds de la Champagne et de la Brie ; que d’ailleurs le prince de Galles étoit en campagne à la tête de fort belles troupes pour faire la guerre au duc d’Anjou, qui se trouvoit fort en peine de luy resister, et qu’enfin toutte la France alloit devenir la proye des Anglois, un theâtre de tragedies où l’on alloit porter le fer et le feu, s’il ne se dépêchoit de courir incessamment à son secours ; que sa propre gloire et même son intérêt particulier l’appelloient à cette expédition, puis qu’il ne seroit pas plûtôt arrivé à la cour, que Sa Majesté luy mettroit entre les mains l’épée de connétable. Bertrand luy répondit qu’un si grand roy luy faisoit plus d’honneur qu’il n’en meritoit ; qu’il alloit là dessus faire touttes les diligences imaginables pour le satisfaite ; mais qu’il étoit necessaire qu’il s’assurât auparavant de la forteresse de Soria, devant laquelle il alloit mettre le siege ; et qu’aussitôt qu’il l’auroit prise, il passeroit par le Languedoc, pour prêter la main au duc d’Anjou que le prince de Galles harceloit, et que cela fait, il se rendroit à grandes journées auprés de Sa Majesté, pour luy donner des preuves de son zèle et de son obéïssance, et sacrifier sa vie même pour son service.

Ce fut dans cette veüe qu’il s’alla présenter devant cette forteresse, où ses deux cousins Alain, et Jean de Beaumont faisoient les derniers efforts pour la prendre, et n’en pouvoient venir à bout, quelques assauts qu’ils eussent donnez, parce que les assiegez se défendoient avec une opiniâtreté invincible. Ils avoient déjà passé deux moix en vain devant cette place. Mais Bertrand se persuadant qu’on n’avoit pas