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L’ORGANISATION PRÉFECTORALE

Dans les conditions où l’on se trouvait et dont personne ne pouvait prévoir la disparition, le vœu général se bornait à souhaiter une réforme administrative grâce à laquelle le pays pût panser ses plaies et se remettre au travail. Et ce vœu ne tarda pas à être exaucé. La loi du 17 février 1800 (28 pluviôse an VIII) créa l’organisation qui non seulement devait fonctionner jusqu’à la fin de l’Empire, mais qui, après la chute de Napoléon, subsista dans ses traits essentiels pendant toute l’existence du royaume des Pays-Bas et sur laquelle repose encore en partie celle de la Belgique moderne[1].

De cette solide machine à administrer, le rouage central est la préfecture, dont le nom, emprunté à la langue officielle de l’Empire Romain, implique déjà l’idée d’autorité qui inspire le nouveau gouvernement. Les Commissaires placés par le Directoire auprès des administrations départementales créées par l’élection, n’avaient été que des agents de liaison entre celles-ci et le pouvoir central. Conformément aux principes révolutionnaires, la constitution de l’an III avait confié aux citoyens les affaires locales tant dans les départements que dans les communes, et n’avait réservé aux Directeurs qu’une sorte de « droit de regard » sur leur conduite. En fait, en Belgique surtout, la pratique avait été tout autre que la théorie. Le gouvernement ne s’était pas fait scrupule d’annuler les élections qui lui déplaisaient, de casser les administrateurs mal pensants et de laisser ses Commissaires outre-passer la limite de leurs attributions locales. L’anarchie à laquelle avait nécessairement abouti ce conflit perpétuel entre ce qui aurait dû être et ce qui était, appelait une réforme radicale. Elle s’effectua par la substitution des préfets aux administrations électives et aux Commissaires.

Désormais, dans chaque département, le pouvoir central possède en la personne du préfet un fonctionnaire nommé par lui, responsable devant lui seul, agissant sous son impulsion

  1. Pour les détails de l’administration impériale et les modifications qu’elle a subies, il suffira de renvoyer le lecteur au livre très précis de P. Poullet, Les institutions françaises de 1795 à 1814. Essai sur les origines des institutions belges contemporaines, p. 537 et suiv. (Bruxelles, 1907).