Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/156

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
136
LE NOUVEAU RÉGIME

modifiées. La bulle du 29 novembre 1801, annexée au Concordat, les remania aussi profondément que l’institution des départements avait remanié les circonscriptions civiles. Au lieu de neuf diocèses, il n’y en eut plus que cinq, ceux de Bruges, d’Ypres, d’Anvers et de Luxembourg étant supprimés. Comme sous l’Empire romain, l’Église adaptait ses cadres à ceux de l’État. Les départements de la Dyle et des Deux-Nèthes constituèrent l’évêché de Malines, celui de Jemappes, l’évêché de Tournai, ceux de l’Escaut et de la Lys l’évêché de Gand, celui de Sambre-et-Meuse, l’évêché de Namur, ceux de l’Ourthe et de la Meuse-Inférieure, l’évêché de Liège. Malines conserva son rang de métropole et la juridiction de son archevêque s’étendit non seulement sur l’ancienne Belgique, à l’exception du département du Forêts, rattaché au siège de Metz, mais encore sur les diocèses d’Aix-la-Chapelle, de Trêves et de Mayence.

Les articles organiques que le Corps législatif ajouta au Concordat et avec lesquels il fut promulgué (18 avril 1802) lui donnèrent une saveur gallicane bien propre à raviver chez le clergé belge l’amertume des anciennes querelles jansénistes et fébroniennes. Il y eut des protestations, et le grand vicaire de Namur, Corneille Stevens, entreprit aussitôt contre lui une lutte qu’il devait continuer jusqu’à la fin de l’Empire. Ancien professeur de l’université de Louvain, son point de vue reste sous Napoléon celui qu’avaient adopté sous Joseph II les van Eupen et les Duvivier. Aux droits que le gouvernement s’arroge sur l’Église, il oppose, tantôt dans des dissertations latines, tantôt dans des brochures en français ou en flamand, les principes de la théologie louvaniste. Traqué par la gendarmerie, non seulement il reste insaisissable, mais il trouve encore des imprimeurs pour les écrits clandestins qu’il date e latebris nostris ou « de la caverne mise à notre disposition par la Providence ». La colère de Napoléon excite en vain contre lui le zèle de Fouché, de Champagny, des préfets : la police ne parvient à mettre la main, ça et là, que sur quelque agent subalterne de l’agitateur. Car des concours bénévoles s’offrent courageusement à lui et il est le centre d’une sorte de conspiration cléricale groupant des maires de village, d’anciens