Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/192

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
172
LA SITUATION ÉCONOMIQUE

luxe à partir de la fin du XVIIIe siècle, ranime l’exportation vers Paris, occupait en 1810 douze mille femmes dans le Brabant. Pour le lin, Faipoult estime en 1805 le nombre des fileuses et des fileurs dans l’Escaut à 101,033 personnes et celui des tisseurs à 21,821, produisant par an 175,370 pièces de 75 aunes.

Rien n’est changé d’ailleurs, ni dans la structure économique ni dans les procédés de cette industrie. Aucune concentration, aucun perfectionnement technique. Le métier à tisser reste ce qu’il était ; le blanchiment continue de se faire en prairie suivant la routine ancestrale. Nulle part, aucun atelier ne comprend plus de trois métiers, et le marché de Gand continue à attirer chaque semaine les tisserands de la campagne apportant leurs produits aux marchands de toile. La manufacture se développe ici sous l’influence exclusive du capital commercial. De la fabrique et du machinisme, on ne surprend pas encore la moindre trace.

Ni la verrerie ni la fonte du fer ne paraissent non plus s’être dégagées des liens du passé. Cette dernière atteste une activité croissante, grâce à l’extension du marché, mais cette prospérité même l’attache à ses anciennes méthodes. Les hauts fourneaux se multiplient sans que leur construction se perfectionne ; le charbon de bois reste le seul combustible employé. Personne ne semble faire effort pour s’initier aux procédés nouveaux qui, en Angleterre, atteignent à des résultats si surprenants.

La draperie verviétoise présente une physionomie plus moderne. Déjà à la fin du XVIIIe siècle, elle témoigne d’un esprit novateur qu’explique la liberté de développement dont elle jouit. N’étant point entravée par le régime corporatif, l’initiative de ses entrepreneurs avait pu se donner carrière. Au système de la manufacture, la fabrique commençait à se substituer. Sans doute, le filage de la laine s’effectuait encore à la campagne et les tisserands à domicile abondaient aux alentours de la ville, dans le pays de Herve et le Franchimont. Mais de plus en plus, les industriels les plus riches et les plus hardis réunissaient dans leurs ateliers les métiers à tisser aux