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LA NOUVELLE BARRIÈRE

Ses menées irritent l’Angleterre et inquiètent la Prusse qui compte toujours sur la ligne de la Meuse et, plus fermement, sur l’Allemagne rhénane.

Cependant, le 1er mars 1814, à Chaumont, les Puissances ont décidé, par un article secret, que « la Hollande, État libre et indépendant sous la souveraineté du prince d’Orange » recevra un « accroissement de territoire » et « une frontière convenable ». Mais quelle sera cette frontière ? Le 30 mai, le traité de Paris rétablissant la paix entre la France et les alliés, ne résoud pas encore la question. S’il reconnaît, également dans un article secret, que l’établissement d’un juste équilibre en Europe exige que « la Hollande soit constituée dans des proportions qui la mettent à même de soutenir son indépendance par ses propres moyens », s’il lui transfère « les pays compris entre la mer, les frontières de la France telles qu’elles sont déterminées par le traité, et la rive gauche de la Meuse », il remet à plus tard de fixer « suivant ses convenances et celles de ses voisins » l’étendue de ce qu’elle recevra à droite du fleuve. Ici, force est bien de tenir compte des revendications prussiennes et de se borner à dire que les régions rhénanes réunies à la France depuis 1792 « serviront à l’agrandissement de la Hollande et à des compensations pour la Prusse et d’autres États allemands ».

Il ne suffisait pas de délimiter le territoire du futur royaume, il fallait encore en assurer la solidité. C’est à quoi pourvurent les « huit articles » que lord Castlereagh amena, non sans peine, le prince souverain à accepter le 21 juillet. Tout y est combiné de telle sorte que « l’amalgame le plus parfait » entre la Belgique et la Hollande garantisse l’unité de l’État. La volonté de l’Europe sur ce point est formelle, et elle s’arroge le droit d’imposer au prince les conditions qui l’empêcheront de compromettre cette unité en avantageant les Hollandais au détriment des Belges. En conséquence, il s’engage à garantir à tous les cultes protection et faveur égales, à rendre tous les citoyens accessibles aux emplois publics, à reconnaître à toutes les provinces les mêmes avantages commerciaux, à faire modifier de commun accord par les Belges et les Hollandais la consti-