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LA LOI FONDAMENTALE

n’altérerait en rien d’essentiel une législation dont le souverain avait à l’avance proclamé l’excellence.

II

En acceptant au mois de décembre 1813 la souveraineté des Provinces-Unies, Guillaume avait promis de l’exercer suivant une « sage constitution » (wijze Constitutie). Quelques jours après (21 décembre), une commission formée de nobles et d’anciens régents avait été chargée de rédiger un projet. Soumis à l’avis de six cents notables et approuvé par eux, ce projet était ratifié et promulgué par le prince sous le nom de Loi fondamentale (Grondwet), terme moins compromettant parce que moins révolutionnaire que celui de constitution.

Après avoir passé successivement par la République batave, le royaume de Louis Napoléon et enfin l’Empire français, la nation hollandaise se trouvait trop profondément transformée pour qu’un retour au passé y fût, non pas même possible, mais concevable. Personne ne songea à une restauration qui eût remis en présence et en conflit le Stadhouder et l’aristocratie des régents, et soumis le peuple à une organisation sociale périmée, que les réformes des derniers temps avaient définitivement détruite. Si conservateur que l’on fût, il fallait bien reconnaître que « l’ancien est maintenant entièrement oublié en politique comme en toute autre chose, et que l’on ne marche plus que dans les souliers de Napoléon »[1]. Quelques-uns se demandèrent même, comme van Maanen, si le meilleur parti n’eût pas été de ne rien changer et de conserver simplement, sous le nouveau prince, le système napoléonien.

En réalité, on en conserva le plus possible. Ainsi que la charte de Louis XVIII en France, la Loi fondamentale hollandaise se présente comme une conciliation ou plutôt comme une adaptation des institutions du nouveau régime avec les traditions du passé[2]. Elle est anti-révolutionnaire, en ce sens

  1. Gedenkstukken 1813-1815, p. 698.
  2. Sur cette constitution voy. H. T. Colenbrander, Ontstaan der Grondwet, t. I.