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REVISION DE LA LOI FONDAMENTALE

présent au passé tant par les traditions historiques de sa maison que par la religion qu’il professe. En reconnaissant le prince d’Orange comme souverain héréditaire et le protestantisme comme religion de l’État, la Loi fondamentale rattache directement la nouvelle monarchie à l’ancienne République des Provinces-Unies.

En somme, elle s’adaptait très exactement au caractère et aux circonstances sociales et politiques de la Hollande. Quant au prince, dont elle comblait les désirs, il s’en montrait enchanté. Mais les Belges auxquels il dut la soumettre après s’être proclamé leur roi, montrèrent moins d’enthousiasme. Les membres qui les représentaient dans la Commission de revision, nommée le 22 avril 1815, appartenaient tous soit à la noblesse, soit à la haute bourgeoisie. Mais Guillaume avait eu soin de les choisir de manière qu’ils en représentassent les diverses tendances politiques. On rencontrait parmi eux un partisan obstiné de l’Ancien Régime, J. J. Raepsaet, un prélat de tendances joséphistes, le comte César de Méan ci-devant prince-évêque de Liège, des conservateurs catholiques, comme le comte Charles de Mérode, le comte de Thiennes et F. Dubois, puis des personnages soit penchant vers les réformes modernes comme le comte d’Arschot, soit tout à fait ralliés à elles comme les anciens préfets de Coninck et Holvoet ou comme les juristes Gendebien, Leclercq et Dotrenge.

Ils se réunirent à La Haye à leur onze collègues hollandais le 1er mai 1815. Ils eussent eu sans doute bien de la peine à s’entendre avec eux si, dès la première séance, le président ne leur avait exhibé le texte des huit articles[1]. Devant cette arche sainte, renfermant la volonté de l’Europe, il n’y avait qu’à s’incliner. Elle coupait court aux débats qu’eût infailliblement provoqués la question religieuse. Pour les catholiques, il n’était plus question de réclamer, comme ils n’eussent pas manqué de le faire, la reconnaissance exclusive de leur religion, puisqu’elle assurait protection à tous les cultes.

  1. Sur les discussions de la Commission, voy. Colenbrander, Ontstaan der Grondwet, t. II.