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LES JOURNÉES DE SEPTEMBRE

renforts. Les ouvriers de fabrique ne furent parmi eux qu’une minorité. Pour la plupart, ils appartenaient à la classe des artisans ou à la petite bourgeoisie. On y rencontre des bouchers, des menuisiers, des peintres en bâtiments, des journaliers, des marchands de liqueurs, des boutiquiers, des commis. D’autres sont des habitants de la campagne, accourus sous la conduite du maréchal-ferrant, comme à Uccle, du vétérinaire, comme à Waterloo, de l’instituteur, comme à Gosselies. Du Hainaut, des maîtres de houillères et de verreries amenèrent des défenseurs[1]. À côté d’eux, on remarque des avocats, des propriétaires, des fabricants. Ainsi parmi les combattants les rangs se confondent comme s’y confondent aussi Flamands et Wallons. Sans doute ceux-ci et particulièrement les Liégeois, furent les plus nombreux. De Gand et d’Anvers, où les Orangistes, grands industriels et commerçants, réussirent à maintenir l’ordre, il ne vint presque personne. Le sentiment catholique qui l’emportait dans les provinces flamandes, comme le sentiment libéral dans les provinces wallonnes, y poussait moins directement à la lutte. Mais le peuple s’y prononça partout en faveur de la Révolution. Durant les combats de Bruxelles, on vit à Saint-Nicolas les ouvriers des filatures agenouillés sous les plis du drapeau belge, autour d’une chapelle rustique, prier pour la victoire des patriotes[2].

Les mesures prises par Frédéric pour l’attaque de Bruxelles attestent sa certitude de l’emporter du premier coup. Les troupes furent dirigées simultanément en quatre colonnes sur le front qui leur faisait face. Deux d’entre elles devaient entrer dans la ville basse par les portes de Flandre et de Laeken, puis, tournant à gauche, tomber par derrière sur les défenseurs de la ville haute, assaillis eux-mêmes par les portes de Louvain et de Schaerbeek. L’attaque principale fut dirigée sur cette dernière, d’où la rue Royale conduit directement aux palais qui constituaient son objectif. Ce fut aussi le point où se concentra l’effort de la lutte et où se prononça la vic-

  1. Voy. la liste des décorés de la Croix de fer jointe à l’arrêté royal du 2 avril 1835. Cf. De Bavay, op. cit., p. 35, 114, 150, 184, 380, 392, 478, 638.
  2. Willemsen, Les événements de 1830 à Saint-Nicolas (Saint-Nicolas, 1905).